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dimanche 29 janvier 2023

« Ecrits mystiques » de Julienne de Norwich (1373)

On y voit deux belles propriétés : l’une, la rectitude de la prière ; l’autre, la vraie confiance. Dieu les requiert au même degré. Alors seulement notre prière lui plaît et en sa bonté il l’exauce.

Je le vois, Dieu est tout ce qui est bon. Dieu a créé tout ce qui existe. Dieu aime tout ce qu'il a créé. Celui qui aime ses semblables dans le Christ aime tout ce qui est.


(…) Jésus, Notre bon seigneur me dit : « (…) Si je pouvais souffrir plus, je le ferais ».

(…) Voici ce qu'il veut dire : « Comment pourrais-je ne pas faire pour toi tout ce que je peux faire, et sans peine, alors que par amour pour toi je voudrais mourir tant de fois sans prêter attention à mes terribles souffrances ? »


(…) puisse la joie que nous ressentons d'être sauvés être égale à la joie que ressent le Christ pour notre salut, autant du moins qu’il nous est possible ici-bas.


Il me réconforta par ces paroles : « Je puis tout tourner en bien. Je sais tout tourner en bien. Je vais tout tourner en bien. Je veux tout tourner en bien. Et tu le verras toi-même toute chose tourneront en bien ». Là où il dit : « je puis », j'entends qu'il s'agit du Père. Là où il dit : « je sais », j'entends qu'il s'agit du Fils. Là où il dit : « je veux », j'entends qu'il s'agit du Saint-Esprit. Là où il dit : « je vais », je comprends qu'il s'agit de la très Sainte Trinité…


(…) nous aussi devons soupirer ardemment après lui : aucune âme ne peut, sans cela, entrer au ciel.


Notre Seigneur nous contemple continuellement, tout au long de notre vie, avec un intense désir d'amour et il veut qu’en retour notre âme le regarde avec satisfaction, par reconnaissance.


Aussi longtemps que je le contemplais, je le savais bien, j'étais en totale sécurité. Hors du crucifix, je n'avais plus aucune assurance : j'avais à craindre les démons.


La partie intérieure est une vie élevée et bienheureuse, qui est entièrement dans la paix et dans l'amour, ainsi qu'on le sent très intimement (…) Cette partie intérieure est maîtresse et souveraine par rapport à l'extérieure (…) Tous ses efforts, toute sa volonté, c'est de vivre continuellement en union avec notre Seigneur Jésus.


Parmi tout ce que nous pouvons faire pour plaire à Dieu, il n'est rien qui lui soit plus agréable que de nous voir nous réjouir en cette joie qu’a la Trinité pour notre salut.


Le point suprême à considérer dans sa passion, c'est de penser et connaître que celui qui souffrit, c'est Dieu (…) C'est pour le péché de tout homme qu'il souffrit. De chacun, il éprouve le chagrin, la désolation, l’angoisse, par commune nature et par amour (…)

Plus rude auront été nos souffrances avec lui ici-bas, plus grande sera notre gloire avec lui dans son royaume (…)

Car il lui dit : « Je t'aime et tu m'aimes, et notre amour ne sera jamais brisé »


Le Père était assis, manifestant sa divinité par le repos et la paix, car en Dieu il ne peut y avoir aucun labeur.


Je vis qu'il est pour nous tout ce qui est bon et réconfortant. Il est notre vêtement d'amour : il nous enveloppe et nous enserre, il nous étreint et nous enclôt. Il nous entoure, pour ne jamais nous quitter. Je vis dans cette vision qu'il est, à mon sens, toutes choses bonnes.

Alors il me montra, gisant dans la paume de sa main, une petite chose, de la grosseur d'une noisette et, selon ce que j'ai compris, ronde comme une bille. Je l'observai et pensai : « Qu'est-ce donc ? » Il me fut répondu, de façon générale « C'est tout ce qui est créé (…) il subsiste et subsistera à jamais, parce que Dieu l'aime. Ainsi toute chose tient son être de l'amour de Dieu ».


(…) si nous voulons aimer et posséder l'Incréé, il nous faut être détaché de tout le crée. Voilà pourquoi nous sommes, de cœur et d’âme, mal à l'aise. Nous cherchons à nous reposer dans les choses infimes, qui ne peuvent nous donner aucun repos. Nous ne parvenons pas à connaître notre Dieu, qui est tout-puissant, tout-sage, tout-bon. Il est le vrai Repos. Il veut que nous le connaissions. C'est son plaisir que nous reposions en lui. Tout ce qui est en dessous de lui ne peut nous suffire. Voilà pourquoi nulle âme n’est en repos si elle ne se vide de la totalité du créé. Quand elle s'est volontairement anéantie par amour pour posséder Celui qui est tout, elle a alors capacité pour recevoir le repos spirituel (…) 

« Dieu, en ta bonté, donne-toi à moi. Tu me suffis. Je ne peux rien demander d’inférieur à ce qui te glorifie pleinement. Sinon, il me manque toujours quelque chose. En toi seul, j'ai tout ».

Par la bonté de Dieu, ces paroles remplissent l’âme d'amour. Elles touchent pleinement notre Seigneur en sa volonté.


La place que Jésus occupe dans notre âme, il ne la quittera jamais, dans les siècles des siècles, d'après ce que je vois, car c'est en nous qu’il a sa demeure la plus intime et son habitation éternelle.


Le péché est le fouet le plus sanglant qui puisse frapper toute âme élue. Homme ou femme, il flagelle chacun de nous. Il le brise. Il rend notre être si haïssable à ses propres yeux qu’il ne se juge plus digne que de tomber en enfer, jusqu'au moment où, touché par le Saint-Esprit, il est saisi de contrition et voit son amertume se changer en espérance dans la miséricorde divine. Alors ses blessures commencent à guérir et son âme à vivre, dès qu'il se tourne vers la vie de la sainte Église. Le Saint-Esprit le conduit à la confession, pour y avouer de plein gré ses péchés, en toute nudité et franchise, avec grande tristesse et honte d'avoir souillé la belle image de Dieu.


(…) Notre-Seigneur ne veut pas que ses serviteurs désespèrent par suite de leurs chutes fréquentes et pitoyables. Semblables chutes ne l'empêchent pas de nous aimer. Sa paix et son amour sont toujours en nous. Ils vivent et opèrent en nous, même si nous ne sommes pas toujours dans la paix et dans l’amour (…)

Mais quand nous nous voyons dans un tel état de souillure, nous pensons que Dieu est irrité contre nous à cause de nos péchés. Alors le Saint-Esprit nous stimule, en nous conduisant de la contrition à la prière et au désir de nous amender de toutes nos forces pour apaiser la colère divine, jusqu'à ce que notre âme trouve le repos, et notre conscience la paix. Nous espérons que Dieu nous a pardonnés. Et il en est ainsi. Notre-Seigneur se découvre à l'âme, avec simplicité, l'air tout joyeux. Il lui souhaite, en ami, la bienvenue, comme si elle avait souffert grande peine ou sortait de prison.


(…) si nous éprouvions les douleurs les plus terribles que le cœur peut concevoir ou la bouche exprimer et pouvions voir à ce moment-là ce visage béni, toutes ces souffrances ne nous affligeraient pas.


Au ciel, durant toute l'éternité, nous verrons combien nous avons pêché gravement pendant notre vie. Et néanmoins nous verrons que son amour pour nous a toujours été sans faille et que jamais nous n'avons été d'un moindre prix à ses yeux (…) l’humilité et la douceur que nous procure la vue de notre chute. Il s'ensuivra pour nous une plus haute élévation dans le ciel, qu’il nous aurait été impossible d'atteindre autrement.


(…) Il fera en sorte que tout finisse bien, car de même que la très Sainte Trinité a créé toute chose du néant, de même elle rendra bonnes toutes choses qui ne le sont pas.


L’homme, lui, juge, d'après sa sensualité ondoyante qui lui fait voir tantôt d'une manière, tantôt d'une autre (…) Aussi ce jugement est-il confus : parfois bienveillant est ouvert, parfois rigide et sévère. En tant qu'il est bienveillant et ouvert, il est en harmonie avec la justice parfaite de Dieu. En tant qu'il est rigide et sévère, notre bon sSeigneur Jésus le réforme, dans sa miséricorde et sa grâce, par sa bienheureuse passion.


Le premier jugement, qui appartient à la justice de Dieu et donc à son amour sublime illimité, est cet admirable et suave jugement qui m'a été manifesté dans toutes ces belles Révélations où je vis que Dieu ne nous inflige aucune sorte de blâme.


(…) Nous sommes depuis toujours dans sa prévoyance…


(…) toutes les peines et travaux de tous les hommes vivants seraient encore insuffisants pour mériter le remerciement qu'un seul recevra pour avoir servi Dieu avec bonne volonté (…) toutes les créatures bénis qui peuplent le ciel verront ce remerciement glorieux, car à toutes il fait connaître les services qui lui ont été rendus. (…) ce remerciement sera aussi nouveau et réjouissant dans l'éternité qu’à l’instant où l’âme le recevra (…) Très particulièrement, ceux qui, volontiers et librement, auront offert à Dieu leur jeunesse seront récompensés sans mesure et remercié de merveilleuses manières.


Si la peine nous est arrachée, elle peut revenir. Aussi y a-t-il là pour l'âme de désir un réconfort souverain et une joie de voir que nous serons arrachés à la souffrance.


(…) par inconnaissance d'amour, nous recourons à de multiples intermédiaires. Je perçus alors en vérité que Dieu est plus glorifié et satisfait quand nous le prions, confiants en sa bonté, quand, par grâce, nous nous attachons à lui dans l'intelligence de la vérité et la fermeté de la foi, qu’il ne l'est quand nous recourons à tous les médiateurs auxquels notre cœur pour songer (…) Car notre prière la plus haute a pour cible la bonté de Dieu, qui se baisse jusqu'à nos besoins les plus bas.


(…) il n'est pas de créature qui puisse savoir avec quelle intensité, avec quelle suavité, avec quelle tendresse notre créateur nous aime.


Notre-Seigneur me fit ensuite une révélation sur la prière. Je vis qu'elle requérait deux conditions : la rectitude ; la ferme confiance.

Très souvent, notre confiance n'est pas totale. Nous ne sommes pas sûrs que Dieu nous écoute, car, par pensons-nous, nous en sommes indignes et d'ailleurs nous ne ressentons rien (…) Prie intérieurement, même si tu n'y a aucun goût. Le profit en est grand, dusses-tu ne rien sentir.


La nature nous pousse à désirer, et la grâce à faire confiance.


Il nous incite à prier pour ce qu’il lui plaît de faire.


Ainsi l’ai-je vu et cherché. Je l'ai possédé et j'ai eu soif de lui. Tel est, telle devrait être, selon moi, notre travail à tous en cette vie.


Cette vision enseigne à mon entendement que l’âme en recherche continuelle plaît à Dieu. Elle ne peut guère, en effet, que chercher, souffrir et avoir foi.


Ce qu'il veut, c'est qu'on ait foi en lui. Il est tout familier et simple.


(…) la béatitude durera éternellement, mais la souffrance passe et sera anéantie pour tous ceux qui seront sauvés. En conséquence, Dieu ne veut pas que nous nous laissions aller avec chagrin et lamentation aux souffrances que nous éprouvons, mais que nous les surmontions sur-le-champ et demeurions dans la réjouissance sans fin qu’est Dieu.


Je vis alors avec certitude qu’il nous est plus facile de parvenir à la connaissance de Dieu que de connaître notre âme. Car cette dernière est si profondément enracinée en Dieu, et gardée éternellement comme un tel trésor, qu’il nous est impossible de la connaître avant de connaître Dieu.


Pourtant, je vis avec certitude que Dieu n'a jamais été irrité et ne le sera jamais (…) Je vis en vérité qu'il est contraire à sa puissance d'être en colère, contraire à sa sagesse, contraire à sa bonté.


Aussi chaque âme doit-elle penser que Dieu a fait pour elle seule tout ce qu'il a fait.


De même qu’en sa courtoisie Dieu oublie notre péché aussitôt que nous nous repentons, ainsi veut-il que nous oubliions le péché que nous avons commis, cessant de nous décourager stupidement et de nous laisser aller à nos craintes pleines de doute.

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