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samedi 13 novembre 2021

« Voyage sans cartes » de Graham Greene (1951)

Et ce qui sauvait ce tableau du mélodrame, c'était son ironie, c'était le fait que cette République a été fondée pour donner à toute l'Afrique exemple d'un État indigène chrétien qui se gouvernait soi-même. Une société philanthropique américaine (on disait que beaucoup de ses directeurs étaient des marchands d'esclaves qui avaient trouvé pratique cette façon de se débarrasser de leurs enfants illégitimes) entreprit au début du XIXe siècle d'expédier des esclaves affranchis sur la côte des Graînes. On acheta des terres aux chefs indigènes, et un comptoir fut fondé à Monrovia. « L'amour de la liberté nous amena ici », mais l'on pourrait difficilement reprocher à ces premiers colons métis de s’être aperçu que l'amour de leur propre liberté n'était pas compatible avec celui de la liberté des tribus indigènes (…) Dès le début, ces esclaves métis américain furent des idéalistes à la manière américaine. Leur déclaration d'indépendance, lorsque la République fut proclamée, brillait du même éclat de marbre blanc que la déclaration des États-Unis. On était en 1847…


Nous traversons comme Wordsworth une époque postérieure à la fois à une guerre et à une révolution (…) Si l'on considère à quels tourments, à quels périls d'extinction, vont mener quelques siècles de cérébration, on a parfois la curiosité de découvrir, dans la mesure du possible, d’où nous sommes partis et quel est le carrefour où nous avons fait fausse route.


Deux d'entre eux passèrent ainsi toute la journée sans se lâcher ; ils étaient là quand le bateau glissa le long des tas d'arachides, ils étaient encore le soir que le travail de chargement fut terminé et que les débardeurs se lavèrent la figure et les mains dans l'eau chaude qui sortait des flancs du navire ; ils n'avaient, quant à eux, absolument rien fait, ils s'étaient simplement promenés de long en large en se touchant la main, chacun riant des plaisanteries que faisait l'autre ; mais ce n'était pas de l’amour, ce n’était rien que nous puissions comprendre. Ils mettaient dans le jour aveuglant, dans ce premier aperçu de l'Afrique, une sensation de chaude et somnolente beauté, de joie étrangère à l'action et libérée de la fatigue de vouloir.


Je ne pus trouver à acheter que deux cartes à une échelle suffisante. L’une, établi par le Grand État-Major britannique, confesse ouvertement son ignorance (…) Là où la carte anglaise se contente de laisser un vaste blanc, la carte américaine emplit ce vide du seul mot, en gros caractères CANNIBALES.


Je n'expose ces plans qui ne se réalisèrent jamais, ces itinéraires qui ne furent pas suivis, que pour donner l'impression du caractère vague de mes projets lorsque j'ai débarqué à Freetown. C'était la première fois que je quittais l'Europe ; j'étais, en ce qui concernait les voyages en Afrique, le plus débutant des amateurs.


Je le pris pour un prospecteur, mais nous découvrîmes par la suite qu'il ne s'intéressait à rien d'aussi substantiel que l’or ou les diamants. Il était là pour s'instruire. Appuyé au dossier de sa chaise, il avait l'air de ne faire attention à personne ; quand on lui posait une question, il avait un petit rire (on pensait : je viens de demander quelque chose de très sot, de très superficiel), il ne répondait qu'un long moment après, une fois qu’on avait oublié la question. Il était jeune, malgré sa barbe ; il avait l'air aristocratique, malgré sa tenue de naufrageur, et il avait plus de sagesse que nous tous. Il était le seul qui sût exactement ce qu'il avait le désir d'apprendre, et qui connût l'étendue précise de son ignorance. Il parlait le Mende ; il apprenait le Bouzi et connaissait quelques mots de Peul ; il y arriverait avec le temps : il n’était en Afrique occidentale que depuis deux ans.


(…) quand la nuit fut tombée, assis entre les murs nus du bungalow de l'ingénieur, à boire de la bière chaude, je n'étais plus aussi rassuré sur la salubrité de cet endroit (…) pendant qu'il parlait, les phalènes entraient en nuées par les fenêtres sans vitres et venaient grésiller sur les lampes-tempête, les cafards et les cancrelats heurtaient avec de petites détonations les murs et le plafond, et retombaient dans nos cheveux. Lui, les insectes ne le dérangeaient pas, disait-il en bondissant de sa chaise pour aplatir entre ses mains les papillons et écraser les cafards sous ses pieds. (Il était incapable de rester tranquille une minute).


A l’intérieur du pays, le temps n’existe pas : les meilleures montres ne résistent pas au climat. Tôt ou tard, elles s’arrêtent.


Ces gens sont tendres avec leurs enfants (…) ils sont tendres l’un envers l’autre, d’une façon douce et voilée ; ils ne crient pas, ne chahutent pas (…) J’ai senti sans cesse l’influence d’un idéal de courtoisie à quoi mon devoir était de me conformer.


Ce fut en vain que j’affirmai énergiquement dans la suite, que je n’avais pas rencontré un seul cas de malhonnêteté chez les boys, les porteurs, les indigènes de l’intérieur ; rien que de la douceur, de la bonté et une probité qu’on ne trouverait jamais ou du moins sur laquelle on n’oserait jamais compter en Europe. Je m’étonnais d’avoir pu voyager dans un pays dépourvu de police, en compagnie de vingt-cinq hommes qui savaient que mon coffre contenait en pièces d’argent ce qui représentait pour eux une fortune (…) il aurait été facile, quand nous traversions un des ponts de lianes, d’organiser un accident ; il aurait été facile, par une mesure moins énergique, d’égarer la caisse ou de nous perdre dans la jungle.


On ne pouvait rien en dire de plus élogieux que ceci : ce petit groupe de prêtres et de religieuses possédait un idéal d'aménité et d’honnêteté égal à l'idéal des indigènes (…) On a écrit bien des sottises au sujet des missionnaires. Lorsqu'on ne les a pas présentés comme étant à la solde des impérialistes ou des commerçants exploiteurs, ils ont été dépeints sous l'aspect d’anormaux sexuels essayant de convertir un peuple païen primitif et heureux à une religion, européenne, et provoquant chez ce peuple, en conséquence, des refoulements européens. Il me semble qu'on oublie toujours que le christianisme est une religion orientale à laquelle les païens de l'Occident ont été convertis avec un certain succès. On accorde même pas aux missionnaires le bénéfice de la logique, car si l’on croit au christianisme, on doit croire à sa validité universelle. Un chrétien ne peut revendiquer un Dieu pour l’Europe et autre Dieu pour l’Afrique. La force de la religion sémite a été de ne pas attribuer un Dieu à l’Orient et un autre à l’Occident. Le nouveau paganisme occidental, qui se targue d’être scientifique, est souvent singulièrement névrosé. Seule un névrose peut expliquer son absence sentimentale de logique lorsqu’il reconnaît à une Mahométan le devoir historique de répandre sa foi au moyen de l’épée et refuse à un chrétien l'obligation morale de répandre cette foi par l'enseignement (…)

Ils n'ont pas imposé de force le christianisme à des gens réticents, ils n'ont pas obligé une heureuse peuplade nue à porter des vêtements, ils n'ont pas interdit les danses indigènes. Le nègre d'Afrique occidentale porte toujours des vêtements lorsqu'il a assez d'argent pour en acheter ; il préfère invariablement une tunique à un pagne, et quiconque a vécu un certain temps dans les villages de la brousse appréciera qu'une tunique indigène, fût-ce la plus grossière, est esthétiquement préférable au corps humain avec ses mamelles flasque et ses plaies qui suppurent. Quant aux danses et au culte fétichiste, les missionnaires ne pourraient s'y opposer, même si ils le voulaient. Ici, le christianisme est acculé dans ses derniers retranchements. Les convertis sont relativement rares ; la conversion n’offre pour les indigènes aucun avantage tangible ; le seul bien qu'il leur réserve est spirituel : on les délivre de quelques craintes et on leur fait l'offrande d'une chimérique espérance.


Aucun indigène, fille ou garçon, n’est considéré comme adulte s’il n’a passé par une de ces écoles de la brousse où les études duraient autrefois, dans certaines tribus, jusqu'à sept année ; deux ans est maintenant la scolarité habituelle. Il n'y a pas de vacances, les enfants restent enfermés dans la brousse ; s’il meurt, les objets lui ayant appartenu sont déposés nuitamment devant la case de ses parents ; cela signifie qu'il est mort et qu'il est enterré dans la brousse. Quand les enfants en sortent, leur retour est considéré comme une seconde naissance, ils n’ont pas le droit de reconnaître leurs parents et amis dans le village et doivent leur être présentés de nouveau. Ils rapportent de la brousse une trace visible : le tatouage (…) L’école et le diable qui la dirige sont au début pour l'enfant des objets de terreur. Ils occupent, entre l'enfance et la virilité, cette place redoutée qu’occupent en Angleterre la Public School. L'enfant a vu le diable masqué, on lui a parlé de son pouvoir surnaturel…


(…) une religieuse un jour en se réveillant avait trouvé, installé sur son oreiller, un rat qui se régalait de l'huile de ses cheveux. Mais on s’y habituait vite, disaient-elles (…) Je ne m'étais jamais habitué aux souris qui courent dans les boiseries ; j'avais peur des papillons de nuit. C’était chez moi une terreur héréditaire : j'ai partagé avec ma mère l'horreur des oiseaux (…) Je les fuyais de même que je fuyais les idées que je n'aimais pas : l’idée de la vie éternelle et de la damnation. Mais, en Afrique, l'on ne peut pas plus leur échapper qu'on ne peut échapper au surnaturel.


À quatre heures, je me réveillai et me levai, sans mettre mes chaussures, pour aller chercher ma veste, parce que j'avais trop froid. Quelques jours après, je m'aperçus que cette négligence m'avait rapporté une chique : c'était un petit insecte qui se creuse un chemin sous la peau de votre orteil, y pond ses œufs et s’y multiplie, jusqu'à ce qu’on l’extirpe en faisant une entaille.


C'est à Nottingham que je fus initié au catholicisme ; (…) La cathédrale était un endroit obscur rempli de statuts médiocres. J'y reçus le baptême par un après-midi de brouillard vers quatre heures. Je ne pus trouver de prénom qui me fît particulièrement envie, aussi gardai-je le mien. J'étais seul avec le gros prêtre ; tout se passa très rapidement et suivant les formes banales, tandis que dans une autre chapelle quelqu'un célébrait en chuchotant un office pour les enfants. Ensuite, nous échangeâmes une poignée de main et je m'en retournai vers le saumon en boîte servi pour le thé et vers le paillasson où le chien avait vomi de nouveau.


Un phonographe jouait, et la voix de Miss Joséphine Baker se répandait dans tout le compound avec une amusante et artificielle mélancolie. Cela donnait un caractère d’irréalité à tout ce qui se trouvait là : aux porteurs assis dans la poussière, aux rangées de cases silencieuses, à la forêt montant en vagues jusqu'à l’horizon…


Je n'ai jamais rencontré un seul indigène de l'intérieur qui parlât avec estime des politiciens de Monrovia (…) Dans le Nord, je fus bien accueilli partout parce que j'étais Blanc, car leur constant espoir était que le pays serait un jour repris en mains par une nation blanche.


Il en fut ainsi pendant les quatre semaines de voyage. Chaque fois qu'ils avaient mangé le matin, ils travaillaient mal, grommelaient et faisaient des palabres ; la nourriture devenait-elle rare, ils travaillaient bien et ils étaient heureux.


C'était étrange, dans cette broussaille touffue et perdue, de s'entendre dire par le guide, montrant du doigt une sente minuscule : voilà la « route » de Voinjema.


Il faisait trop chaud pour parler (…) Les vieux clignaient des yeux et se grattaient les aisselles, la tête et les cuisses ; ils fouillaient sous leurs robes flottantes pour y trouver un nouvel endroit à gratter. Il faisait trop chaud pour éprouver la moindre curiosité au sujet de qui que ce fût, et cependant quelques villageois plus jeunes passèrent sous le chaume en se courbant, s’assirent, me dévisagèrent et commencèrent à se gratter.


(…) je ne pus m’empêcher de me rappeler que l’homme qui marche en tête risque d’être attaqué par un serpent, et celui qui vient derrière par un léopard, car - ce que qu’on dit - les léopards vous sautent toujours dans le dos.


Il était curieux de constater combien les femmes attirantes étaient rares ; peut-être l’activité sexuelle est-elle atténuée par la chaleur extrême et les longues marches, mais cela s’explique, je crois, en grande partie, par le peu d’intérêt que ces femmes accordent aux préoccupations sexuelles. Nous remarquâmes qu'elle ne s’intéressaient qu'à la couleur ou aux vêtements de leurs visiteurs, non à leur sexe, jusqu'au moment où nous approchâmes de la Côte, donc de la « civilisation ». Leur nudité, en outre, était très monotone ; à la contempler ainsi on peut mesurer le petit nombre de gens qu'on a du plaisir à voir nus, et la brièveté du moment de leur vie où ils peuvent nous donner ce plaisir.


Il n'y a pas tant de virginité dans le monde qu'on ne puisse s'offrir le luxe de l'aimer quand on l’y rencontre.


Il y avait une maison d'accueil pour les voyageurs, en dehors du village, au milieu d'un petit compound pourrissant, mais il y avait si longtemps qu'aucun Blanc ne l'avait occupée qu'elle était dans un état horrible de décrépitude ; la case était pleine de vermine et brusquement, tandis que nous prenions le thé, une nuée de mouches s’abattit sur toute l'enceinte, et vint se poser sur nos visages et notre nourriture. Le petit singe, assis dans un coin, geignait comme un enfant ; quand le soleil baissa, les mouches nous quittèrent et les cancrelats apparurent ; il se cognaient au mur avec de petites détonations. Un rat était mort sous le plancher et l’odeur de son cadavre en décomposition se répandit partout. C'était le second endroit où nous n'avions d'autre ressource que de nous enivrer.


Le ver de Guinée ou filaire se fraye un chemin par la plus petite écorchure de votre pied et monte parfois jusqu'au genou. Si l’on met alors le pied dans l'eau, le ver crache ses œufs dans l'eau par la blessure. La seule façon d'y remédier, en l'absence d'un médecin, et de chercher son extrémité, comme on cherche le début d'une bobine de fil, et de l'enrouler sur une allumette sans le casser. Si le ver se casse, il y a danger d’infection.


Nous étions au pays des Manons, d’où le cannibalisme rituel pratiqué sur les étrangers n’a jamais pu être entièrement supprimé (…) C’était un sinistre univers que celui de Ces Sociétés. Quatre hommes, me raconta le Dr Harley, arrivèrent à Ganta il y a un an ou deux ; il venait du nord pour chercher une victime. Chacun savait à Ganta qu’ils étaient là pour se procurer, suivant le rite, le cœur d'un homme, les paume de ses mains, la peau de son front, et personne ne savait qui ils étaient.


(…) il y existe une société secrète qui adore un vrai python à qui chaque année un bébé doit être sacrifié par les grands initiés.


Au bout d'un moment, il sembla retrouver assez de vitalité pour expliquer :

– Voyez-vous, Faulkner a une idée.

– Laquelle ?

– Personne ne le sait, répondit Mr Nelson, mais nous ne l’aimons pas.

Dans la lumière crépusculaire, un jeune homme sortit de la forêt suivi d'un petit garçon qui portait un fusil. C'était un indigène au visage rond, doux et triste, vêtu d’une culotte de golf avec des petits glands de couleur vives au-dessous du genou et le même chapeau de cow-boy que Mr Nelson.


D'étrange petites bribes éparses de « civilisation » se retrouvaient çà et là dans ce lieu primitif ; elles semblaient indiquer qu'enfin nous nous dirigions vers le Sud. Dans la maison de cuisine quelqu'un avait peint avec des couleurs vives d’enfantines petites images de bateaux à vapeur ; un petit garçon se promenait un parapluie à la main, son costume composé uniquement d'un lambeau d’étoffe bleue accroché à un rang de verroterie et cachant les parties génitales, en plus d'une ceinture d’écolier européen, dont la boucle représentait un serpent et qu'il portait au milieu du torse, entre les seins et le nombril. Ce qui m'apparut aussi que un vestige de « civilisation » (car l’inversion sexuelle est rare chez les Noirs) fut qu'un couple de pédérastes nus, les cheveux serrés en bouclettes, se tinrent toute la journée devant ma case, côte à côte et les bras entrelacés, à me regarder fixement. Vande s’enivra une fois de plus avec du vin de palme et Amah se trancha le bout du doigt en hachant de la viande avec une de mes épées pour le repas des porteurs.


J'allais faire une promenade ; je me sentais mal portant et plein de nostalgie ; la Côte me paraissait être aussi éloignée que jamais. Il me semblait tout à fait insensé de me trouver au milieu du Libéria, alors que tout ce que je connaissais intimement était européen. J'avais une impression de cauchemar. Je n'arrivais pas à me rappeler pourquoi j'étais venu. J'aurais voulu repartir sur-le- champ, mais je n'en avais pas la force…


Le colonel Davis croyait fermement au pouvoir des Faiseurs de Foudre. Il avait visité des villes où les membres de ces sociétés avait fait des démonstrations en son honneur. Ils lui disaient que l’éclair jaillirait à telle heure, et à l'heure dite, dans un ciel sans nuage, le long des collines, à des lieux à la ronde, la foudre se mettait à gronder.


(…) et quand le chemin tourna, au départ de la route élargie, nous vîmes… un camion. J'avais envie de rire tout haut, de crier, de pleurer ; c'était la fin, la fin de la pire sensation d'ennui que j’eusse jamais connue, la fin de la pire crainte et de la plus atroce fatigue. Si je n'avais pas été aussi exténué (nous étions le 2 mars, et nous marchions, jour pour jour, depuis quatre semaines, au cours desquelles nous avions couvert trois cent cinquante milles - environ 560 km -, la civilisation ne m'aurait pas semblé aussi désirable en comparaison de ce que je quittais…


Je n'aurais sans doute plus jamais l'occasion de vivre longtemps en compagnie de gens aussi simples et aussi purs ; eux, voyaient pour la première fois des magasins en grand nombre, la mer, un camion automobile ; leurs yeux luisaient d'animation (…) La Côte est pour les voyageurs l'endroit le plus dangereux de tout le Libéria, parce que les habitants y ont été atteints par la civilisation qui leur a appris à mentir, à voler et à tuer (…) L'eau-de-vie de Cannes était la seule chose bon marché à Grand Bassa et je fis sans difficulté la différence entre l'ivresse qu'elle leur procurait et l’heureux état de douceur et de somnolence où les mettait le vin de palme. Cet alcool -ci était brut et leur ivresse était la soûlerie brutale de la Côte.


Ce voyage, s'il n'avait servi qu'à cela, avait renforcé le sentiment de déception qu'on éprouve devant ce que l'homme est parvenu à faire du primitif, ce qu'il a fait de l’enfance (…) cela explique peut-être le profond attrait de tout ce qui est pauvre : c'est plus près du « commencement ». Comme à Monrovia, la construction des édifices est partie de travers mais ce n'est, du moins, qu'un commencement ; les choses ne sont pas allées aussi loin que chez les malins, les modernes, les élégants, les intellectuels (…) Lorsqu'il vous a été une fois permis d'apprécier ce «commencement », ses terreurs autant que sa placidité, sa force autant que sa douceur, on sent avec plus d'acuité la grande pitié de ce que nous avons fait de nous-mêmes.

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