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lundi 25 janvier 2021

« La maison de ruines » de Ruby Namdar (2013)

Les femmes qu’Andrew avait connues depuis son divorce se ressemblaient toutes étrangement. Toujours des alter ego. Il les rencontrait par le biais du réseau étroitement tissé que formait l'élite des intellectuels de professions aux commandes des institutions de la ville : professeures, éditrices de magazine, critiques littéraire - des femmes diplômées, séduisantes, élégante, âgées de la petite quarantaine, dotées d'une forte présence et d’un esprit affûté, grandes, minces et sportives pour la plupart.

Tous les professeurs ou presque ont dans leur classe un étudiant qui devient le centre de gravité.

Andrew s'était rendu pour la première fois en Israël en 1969 avec un groupe d'étudiants (…) Leurs guides sionistes ne les quittaient pas d'une semelle. Bruyants et hyperactifs, ils se ressemblaient tous, même sur le plan physique : bronzés, énergiques, arrogants, avec un ton dans lequel raisonnait un rire méprisant (…) Leur assurance frisait la pathologie ; impossible pour eux d’écouter la moindre phrase jusqu'au bout. Fondamentalement hautains, ils remettaient en cause la virilité de quiconque n'était pas Israélien et croyaient que les femmes du groupe, ayant enfin rencontré des hommes, des vrais, leur tomberaient dans les bras comme des fruits mûrs.


Bert lui faisait penser aux éléphants domestiqués que l'on trouvait en Inde ; il s'était documenté sur le sujet (…) D'après ce qu’il se disait, les dresseurs attendaient la mousson pour faire leur apparition, puis attachaient les éléphanteaux à un arbre, les exposant pendant des jours et des jours au mauvais temps. Affamés et terrifiés par les éléments déchaînés, les éléphants tentaient de briser leur chaîne jusqu’à tomber d’épuisement. Aussi gros et puissants qu'ils deviendraient une fois adultes, ils ne connaîtraient ainsi jamais leur véritable force et ne l'utiliseraient jamais au-delà de ce qu'ils avaient déployé durant ces jours atroces.


Bert aurait de loin préféré un classique « Bonjour, professeur Cohen », mais la tendance, qui était à la démocratisation, interdisait aux gens de s'appeler par leur titre ou par leur nom.


Qui, aujourd'hui, ose encore parler de la force libératrice du conformisme, de la bénédiction que le modèle de vie unique américain a apporté, libérant tout un chacun des catégories - sociales, religieuses, ethniques - dont les peuples européens étaient prisonniers ?

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