C’est lorsque, dans toujours plus d’établissements, l’enseignement consiste non à transmettre son savoir mais à savoir « tenir sa classe » (comme il est dit très officiellement) que le vivre-ensemble entre dans la langue. La fréquence du mot traduit le désarroi d’une société qui voit la disparition de la chose.
Laïque est l’Etat qui nous permet, dans le respect des règles de droit, de conduire notre existence comme nous l’entendons, comme ça nous chante, à la lumière de nos propres choix de conscience. D’où le fait que, dans nos sociétés, le vivre-ensemble soit le contraire d’un vivre ensemble. Ce n’est pas un vivre à l’unisson mais un vivre à distance, chacun selon ses convictions, ses envies, ses habitudes, libre des autres et en paix avec eux.
Quand tout est mis en commun, ces simples mots : « Cela ne vous regarde pas ! » sonnent comme une trahison : les rideaux sont arrachés, il n’y a de vie que publique, le règne de Big Brother peut commencer.
« (…) l’instituteur (…) est le seul et l’inestimable représentant des poètes et des artistes, des philosophes et de tous les hommes qui ont fait et qui maintiennent l’humanité. Il doit assurer la représentation de la culture. » (Charles Péguy)
La transmission des savoirs à tout à perdre de la confusion du cognitif et de l’affectif (…)
« La force du maître, quand il blâme, c’est qu’à l’instant d’après, il n’y pensera plus. Et l’enfant le sait très bien. » (Alain, « Propos sur l’éducation »). Pourquoi le sait-il très bien ? Parce que ce n’est pas l’enfant du maître ni un de ses « gamins », comme disent aujourd’hui les spécialistes de l’éducation, mais son élève.
Tandis que, sauf dans les dernières enclaves de l’élitisme républicain, les professeurs sont invités à faire preuve de toujours moins de sévérité, c’est-à-dire d’exigence intellectuelle, et de toujours plus de sollicitude, c’est-à-dire dans la langue de Pascal, de charité, en supprimant les notes ou en préférant la « note encourageante » à la « note vraie »…
(…) il s’agit par le moyen du voile, d’occulter « les signes maléfiques de séduction et de sédition » dont, selon la version la plus active et la plus combative de l’Islam, le corps féminin est porteur. En excluant le voile des lieux dévolus à la transmission, la France a clairement signifié qu’elle ne pouvait s’accommoder ni de cette occultation ni de ce réquisitoire, quand bien même certaines de celles qui en font les frais les approuveraient et les reprendraient avec enthousiasme à leur compte : le fait de valider sa propre diabolisation ne rend pas celle-ci plus acceptable.
Rifa’a al-Tahtâwî, l’un des quarante-quatre membres de la première mission scolaire dépêchée en France par le pacha d’Egypte pour un séjour de cinq ans, entre 1826 et 1831. A Paris, il découvre, stupéfait, une étrange civilisation où tout marche à l’envers puisque les hommes « se mettent sous le commandement des femmes, qu’elles soient jolies ou non. » La précision est capitale : la galanterie ne suit pas la nature, elle y contrevient en choisissant d’inclure même les laides, mêmes les disgracieuses dans l’hommage au « beau sexe ». Tahtâwî, habitué à considérer les femmes comme du « mobilier » (…) Conclusion générale de Tahtâwî : « Plus un homme d’adresse aux femmes avec amabilité et fait leur éloge, plus on apprécie son savoir-vivre ».
Les nobles portaient l’habit, la veste et la culotte. Celle-ci (…) descendait jusqu’au dessous du genou où elle était tenus par une jarretière à boucle ou par un ruban noué. Avec la Révolution, le peuple sort de l’ombre et il ne se change pas pour entrer sur la scène de l’histoire : il apparaît comme il est, son pantalon devient même l’insigne de l’égalité des citoyens et de l’honorabilité du travail. Pour la première fois, la classe inférieure est érigée en modèle (…) Vaincu politiquement, le sans-culottisme triomphe vestimentairement (…) les hommes ne portent plus de rubans et de plumes à leurs chapeaux. Ils entrent dans l’ère démocratique en sacrifiant l’esthétique : à eux l’utilité et la commodité ; à elles, la tâche d’être belles.
On a même du mal à imaginer (…) qu’en 1976 le Premier ministre Jacques Chirac ait pu être scandalisé de voir l’une de ses ministres, Alice Saunier-Seïté, arborer un pantalon au point de lui faire dire qu’elle dégradait sa fonction et l’image de la France.
Ce qui rend dur et brutal, c’est la mauvaise réputation de la douceur, c’est un définition de la virilité qui implique le dédain et même le dégoût de celles qui « veulent bien », c’est, pour tout dire, la vigilance sans faille que la misogynie collective exerce sur le comportement de chaque individu.
On dit que le voile protège la pudeur, alors qu’il réduit pornographiquement les relations entre les sexes au désir, et le désir lui-même à une pulsion bête et violente. En cachant la chevelure que nul homme, hormis l’époux, ne saurait voir, ce bout de tissu signifie aux femmes que leur présence est obscène, que tout en elles et sur elles renvoie à leur anatomie et qu’elles constituent, de ce fait, un trouble potentiel à l’ordre public. Le contraire du panérotisme galant : un pansexualisme oppressant.
« Les esprits éclairés, qui ont cru bon de rompre le cours des choses n’ont aucun respect pour la sagesse des autres, mais en compensation ils font à la leur une confiance sans bornes. Il leur suffit d’un seul motif pour détruire un ordre des choses ancien, son ancienneté même. » (Réflexions sur la Révolution de France, Edmund Burke). Il se font gloire, ces esprits éclairés, de secouer les vieux préjugés alors que ceux-ci sont « la banque générale et le capital constitué des nations et des siècles, et qu’il vaudrait bien mieux employer sa sagacité à découvrir la sagesse cachée qu’ils renferment », mais ils négligent, dans leur combat pour les Lumières, les lumières de la coutume. Ils croient libérer leur intellect d’un tas de vieilleries alors qu’ils se privent d’un trésor d’intelligence.
L’homme (…) est issu d’une source qui le précède et le transcende (…) il naît avec une dette qu’il est tenu d’honorer (…) Si l’on veut rester humain, on doit faire preuve d’humilité, et je jamais perdre de vue qu’il n’y a pas que soi en soi…
Conçue comme l’antithèse de l’Europe qui a enfanté la catastrophe, elle doit veiller à remplacer l’intériorité par les procédures. Car qui dit « intérieur », dit aussitôt « extérieur ». Qui dit « nous », dit « eux ». Qui cultive la chaleur du dedans institue par là même un dehors inquiétant et hostile.
Ne plus construire un collectif sur la destitution et la persécution d’un autre : telle est donc la grande promesse de l’Europe posthitlérienne. Aussi quand il s’agit d’illustrer les billets de la monnaie unique, le choix se porte-t-il (…) sur des images de synthèse représentant des ponts. (…) L’Europe n’est pas un lieu, mais un lien, un passage, une passerelle et qui loin d’incarner une civilisation particulière, elle s’élève au-dessus de tous les particularismes.
(…) le philosophe français Jean-Marc Ferry en définissant l’identité européenne comme la « disposition à s’ouvrir à d’autres identités ». tout le contraire d’une identité close repliée sur son héritage mais aussi d’une identité conquérante imbue de ses vertus civilisatrices. Pas plus donc un modèle à propager qu’un fonds spirituel ou qu’un patrimoine à protéger (…) Pour se racheter une conduite (…) il lui faut abdiquer toute image de soi, et passer « de l’universalisme à l’hospitalité ».
Il ne s’agit plus pour elle de convertir qui que ce soit (…) mais de reconnaître l’autre à travers la reconnaissance des torts qu’elle a commis à son endroit.
Aux pensées et aux passions xénophobes, Badiou, comme Vattimo, oppose (…) la haine de la maison natale, et la volonté de se défaire de tout le mobilier qu’elle a accumulé au cours des siècles (…) En 2011, un agenda a été distribué dans les établissements scolaires de l’Union européenne : toutes les fêtes religieuses y figuraient, à la remarquable exception des fêtes chrétiennes.
« Nous sommes quand même avant tout un peuple européen de race blanche, de culture grecque et latine et de religion chrétienne. » (de Gaulle)
Neutraliser l’identité domestique, cette chimère assassine, au profit des identités diasporiques et minoritaires…
(…) la nouvelle norme sociale de la diversité dessine une France où l’origine n’a droit de cité qu’à la condition d’être exotique et où une seule identité est frappé d’irréalité : l’identité nationale.
La société se doit désormais d’être inclusive.
Pour la première fois dans l’histoire de l’immigration, l’accueilli refuse à l’accueillant, quel qu’il soit, la faculté d’incarner le pays d’accueil. Et en 2012, le Collectif contre l’islamophobie a lancé une grande campagne de sensibilisation, sous ce slogan sans équivoque : « La nation, c’est nous. »
Un autre rapport, plus récent, celui déjà cité du Haut Conseil à l’intégration : « (…) depuis plusieurs années, dans un nombre croissant d’établissements, les cours d’histoire sont le lieu de contestations, ou d’affrontements et de mise en concurrence de mémoires particulières qui témoignent du refus de partager une histoire commune… »
(…) l’Europe a justifié sa domination sur le reste du monde par les prouesses techniques dont elle pouvait se targuer. En montrant de quelle cécité ce sentiment de supériorité témoigne, Lévi-Strauss lui rabat le caquet (…) Roger Caillois a objecté à l’ethnologue que l’enquête ethnologique était l’apanage de la civilisation occidentale et la preuve « incontestable » de sa supériorité (…) Aucune n’avait su comme la nôtre sortir ainsi d’elle-même. Cette objection (sérieuse) n’a pas été retenue (…) Vingt ans plus tard, Claude Lévi-Strauss prononce, dans la même enceinte, une autre conférence, Race et culture, et là, devant les délégués majoritaires et médusés des pays du tiers-monde, il fait scandale (…) : « Il n’est nullement coupable de placer une manière de vivre ou de penser au-dessus de toutes les autres et d’éprouver peu d’attirance envers tels ou tels dont le genre de vie, respectable en lui-même, s’éloigne par trop de celui auquel on est traditionnellement attaché. »
Nous ne produisons du neuf qu’à partir de ce que nous avons reçu. Oublier ou excommunier notre passé, ce n’est pas nous ouvrir à la dimension de l’avenir : c’est nous soumettre, sans résistance, à la force des choses.
L’abandon de la grande ambition des Lumières, qui était de donner au monde entier notre visage, ne doit pas conduire à l’effacement de ce visage. Et pour bien se faire comprendre, Levi-Strauss prêche par l’exemple. Dans De près et de loin, un livre d’entretiens avec Didier Eribon, publié en 1998, il affirme que si une communauté ethnique « s’accommode du bruit ou même s’y complaît », il ne la vouera pas aux gémonies, il ne prononcera pas son exclusion du genre humain et il se gardera bien évidemment d’incriminer son patrimoine génétique. Toutefois, ajoute-t-il, « je préfèrerai ne pas vivre trop près, et n’apprécierai pas que, sous ce méchant prétexte, on cherche à me culpabiliser. »
La bonne conscience nous est interdite mais il y a des limites à la mauvaise conscience. Notre héritage qui ne fait certes pas de nous des êtres supérieurs mérite d’être préservé et entretenu.
Pour ne pas reconduire les horreurs du passé et pour relever le défi contemporain du vivre-ensemble, on voudrait aujourd’hui effacer la proposition identitaire. Levi-Strauss nous enseigne, à l’inverse, qu’elle doit être maintenue fermement et transmise sans honte.
Mais savons-nous et pouvons-nous encore transmettre ? Y a-t-il encore une place pour les œuvres et les actions des morts dans le monde fluide, volatil et volubile des vivants ?
Ainsi on coupe le contact avec ses contemporains quand on ouvre un livre ; on entre en communication avec eux quand on allume son ordinateur.
(…) les libres enfants du numérique (…) sont plongés par le continuum de l’information dans l’oubli de l’œuvre et quand ils ferment la porte de leur chambre, ce n’est pas pour se mettre à l’écart, c’est pour se brancher et pour « chatter » à loisir. Ils remplacent le plaisir du texte par la frénésie du texto et, des SMS aux pages Facebook, la lecture s’absorbe dans le babil sans fin de la sociabilité virtuelle.
L’acte de lire reste essentiel dans la société numérique. Mais il s’est scindé du livre. Le livre a perdu la bataille de la lecture.
Aux parents et aux professeurs de calquer leurs pratiques sur les façons d’être, de regarder, de s’informer et de communiquer de la ville dont les princes sont les enfants.
(…) un ethnocentrisme du présent non moins borné, non moins exclusif que l’ancien esprit de clocher.
La majorité des enseignants obéissent aux consignes : choisir une problématique proche des élèves. Ils disposent d’ailleurs, à cette fin, d’ouvrages avec des cours tout faits sur les situations qui ont ont en commun de n’être pas dépaysantes : « le divorce des parents, « la vie difficile dans la cité, confrontée au racisme », par exemple. Ce qu’on appelle glorieusement l’ouverture sur la vie n’est rien d’autre que la fermeture du présent sur lui-même.
(…) pour la première fois dans l’histoire, les trois conditions de possibilité de l’entretien avec les morts - le silence, la solitude, la lenteur - sont attaquées en même temps. L’identité nationale est ainsi broyées, comme tout ce qui dure, dans l’instantanéité et l’interactivité des nouveaux médias. Il n’est donc pas besoin de philosophes ou d’historiens pour la déconstruire. La technique suffit à la tâche (…)
En 1925 (…) le grand romaniste allemand Ernst Robert observe encore que « la littérature joue un rôle capital dans la conscience que la France prend d’elle-même et de sa civilisation » et qu’« aucune autre nation ne lui accorde une place comparable. »
« Les républiques favorisent davantage le développement des sciences et les monarchies civilisées celui des arts polis » écrit Hume. Dans les républiques (et pour Hume, l’Angleterre, régime parlementaire, est une république), on recherche ce qui est utile et s’applique à la vie commune ; dans les monarchies civilisées (dont la France est alors le modèle), on cultive le loisir, on pratique l’art de la conversation, et il ne s’agit pas pour celui qui veut gagner les bonnes grâces des grands d’être utile, mais de se rendre agréable « par son esprit, sa complaisance et sa civilité. »
Quelles qu’aient été les raisons - pose ou inclination véritable -, la bourgeoisie tenait la culture en haute estime. Les nouvelles élites, surbookées et hyperconnectées, se sont, quant à elles délestées de l’héritage des siècles. Bourgeoises, elles ne le sont que par leur goût du confort. Le reste est passé à la trappe.
(…) la beauté régit la langue et le style n’est pas un enjolivement gratuit, mais, comme le soutenait Proust, une qualité de la vision. Cette foi s’estompe (…) Désormais, les nouveaux Grevisse ne forment pas un tribunal mais une chambre d’enregistrement. Ils n’indiquent plus la marche à suivre ; se gardant bien de faire la police, ils accompagnent, tout sourires, l’évolution de la langue. Au lieu, comme autrefois, de soumettre l’expression orale aux règles du bien écrire, ils entreprennent de l’arracher à l’emprise mortifère des puristes : la pratique majoritaire désormais constitue la norme.
Mais comme le souligne admirablement Péguy dans Les Suppliants parallèles, « il y a un abîme pour une culture (…) entre figurer à son rang linéaire dans la mémoire et dans l’enseignement de quelques savants et dans quelques catalogues de bibliothèque, et s’incorporer au contraire, par des études secondaires, par des humanités, dans tout le corps pensant et vivant, dans tout le corps sentant de tout un un peuple, (…) dans tout le corps des artistes, des poètes, des philosophes, des écrivains, des savants, des hommes d’action, de tous les hommes de goût, (…) de tous ces comme en un mot qui formaient un peuple cultivé, dans le peuple, dans le peuple au sens large. » Ce peuple n’existe plus.
Le fonctionnalisme règne donc et il conduit à l’uniformité. Une fois le verbe réduit à un véhicule, à un moyen d’information et de communication, tout le monde en vient à emprunter le plus confortable.
Soit, en effet, la vérité, résulte d’une mise à l’épreuve ; soit elle est déjà là, cachée, refoulée et ne demande qu’à sortir. Dans le premier cas, l’homme véridique est celui qui fait tout ce qui est en son pouvoir pour ressembler à l’image qu’il a décidé de donner de lui-même : il s’accomplit par le défi qu’il se lance. Dans le second, l’homme vrai est celui qui dénonce sans trembler les tabous, les faux-semblants, les protocoles : il se réalise en se désinhibant. C’est ce second modèle que notre temps a choisi. Là où il y avait ascèse, on ne voit désormais que travestissement et trucage.
Hobbes a écrit le Léviathan dans une Europe ravagée par les guerres civiles. Il a vu à l’œuvre, en deçà des schismes religieux ou des antagonismes idéologiques, trois causes principales de conflit : la compétition, la défiance, la gloire. « La première, écrit Hobbes, pousse les hommes à attaquer pour le profit, la seconde pour la sécurité et la troisième pour la réputation. »
Dans les temps démocratique, toutes les autorités deviennent suspectes, sauf l’autorité de l’opinion (…) Affranchi de la tradition et de la transcendance, l’homme démocratique pense comme tout le monde en croyant penser par lui-même.
L’homme étant par nature, à leurs yeux, un animal politique, les Grecs n’avaient nul besoin, pour penser la société, de l’idée de contrat social. Mais, sous le nom d’aidos, ils plaçaient la restriction de l’estime de soi-même au fondement de ce que nous appelons aujourd’hui le vivre-ensemble. L’aidos, c’est la réserve, la modestie, la pudeur qui naissent, en nous, de l’intériorisation du regard des autres.
Ces œuvres en imposent. Nos maîtres, nos pères, nos devanciers en font l’éloge et nous leur faisons confiance. Qu’est-ce qu’un classique, en effet ? C’est un livre dont l’aura est antérieure à la lecture. Nous n’avons pas peur qu’il ne nous déçoive mais que nous ne le décevions en n’étant pas à la hauteur. Nous admirons avant de comprendre et, si nous comprenons, c’est parce que l’admiration a tenu bon et forcé tous les obstacles.
(…) avec l’abolition de la censure, ce n’est pas la créativité de chacun qui triomphe, c’est l’impudeur de tous : « Monsieur, j’ai envie de faire caca »…
Personne, à l’école, ne se lève, plus personne ne s’incline devant rien. Dans le même temps qu’elle promeut le respect, la démocratie proscrit la transcendance, et l’institution obtempère.
Ces nouveaux parents ne relaient plus à la maison le point de vue de l’école, ils tendent à devenir les délégués syndicaux résolus et râleurs de leurs progéniture. Ils défendent le bien-être de celle-ci contre les exigences des maîtres et leur principale fédération milite d’autant plus activement pour la suppression des notes, des devoirs et des redoublements au collège qu’elle vit à l’heure démocratique où tous les individus, enfants compris, sont rois.
Quand je mets les formes, je respecte un usage, bien sûr, je joue un rôle, sans doute (…) Mais surtout, comme l’a bien montré Hume, je fais savoir à l’autre ou aux autres qu’ils comptent pour moi. Je les salue, je m’incline devant eux, je prends acte de leur existence en atténuant la mienne. L’enfant abandonné à son égocentrisme natal et aux nouvelles technologies fait l’inverse : il frappe d’inexistence la personne qu’il a en face de lui.
L’ancien régime familial exigeait d’eux que leur enfant fût bien élevé. Ils lui enseignaient donc, écrit très justement Marcel Gauchet, « à se regarder comme un parmi d’autres.» Le nouveau régime veut qu’il soit épanoui.
Comme si enfin - je cite ici Leo Strauss - « l’éducation libérale qui consiste en un commerce permanent avec les grands esprits » n’était pas un « un entraînement à la modestie la plus haute, pour ne pas dire à l’humilité. »
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire