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lundi 1 juillet 2013

« Marthe Robin – Le mystère décrypté » de François de Muizon (2011)

Nous sommes à la fin de l’année 1931, quand la paralysie de la déglutition l’empêche totalement de manger et de boire. Marthe a bientôt 30 ans (…) Cette absence totale d’alimentation pose alors la question des limites du corps humain (…) Si l’on s’en tient à la sphère du monde occidental et aux expériences recensées chez les mystiques catholiques, l’histoire d’êtres demeurant sans manger ni boire durant de longues périodes n’est pas sans précédent (…) Marthe a établi une sorte de record en dépassant les cinquante ans sans que son espérance de vie en semble affectée pour autant, puisqu’elle est décédée à l’âge de 79 ans.

Marthe prend la double décision de ne plus consulter de médecin et de ne plus utiliser de médicaments (…) Marthe ne consulte donc plus de médecins durant les quarante dernières années de sa vie.


« Moins l’on fait cas de soi, moins l’on souffre (…) la joie décentre »
(Alexandre Jollien, « Le philosophe nu »)

« La joie est un sentiment unique, qui se reconnaît tout de suite, elle est la dilatation du cœur quand la vie se communique et se répand. Elle correspond au mystère de l’Esprit de Dieu. Or le don de la vie survient au terme d’un entier détachement de soi-même. »
(Jean-Claude Sagne, « L’amour miséricordieux du Père »)

La hiérarchie de l’Eglise a réagi trop tard. Un rendez-vous avait bien été pris dans un établissement de Lyon mais Marthe est morte avant.

« Son idée est que, pour l’amour, à la fin du XXè siècle, règne sur cette terre, il faut rapprocher (…) supprimer les conflits. Et pour cela comment faire ? C’est très simple. On prendra le système inventé par Ignace de Loyola, système des retraites fermées. Ainsi on fera que dans cette retraite dite fermée, tout le monde soit mêlé ; et l’on imposera le silence. L’on multipliera ces retraites qu’on appellera des foyers d’amour sur la terre entière. Et à partir de ces étincelles, on pourra peut-être un jour faire naître un brasier. » (Jean Guitton)

Les hommes sont donc admis pour la première fois à la retraite qui débute le 8 septembre 1941 à Châteauneuf-de-Galaure. Dorénavant, les retraites de chrétienté seront mixtes.

Marthe suit de près tout ce qui se passe dans les établissements sans qu’il y ait une obligation stricte de la tenir informée. Le directeur ou la directrice est libre de lui rendre compte comme il (ou elle) l’entend. Il en va de même de chaque enseignant qui se rend librement à la ferme pour faire le point quand bon lui semble. Les échanges sont constants et variables en fonction de l’évolution de chaque classe et des problèmes particuliers qui surgissent. Marthe remplit une fonction de conseillère extérieure. Sans avoir de statut officiel.

Il est admis que si un enseignant a un problème avec un enfant par exemple, il peut, s’il le souhaite, en référer directement à Marthe sans avoir besoin de demander une autorisation à son directeur ou à sa directrice.

« Il n’y a pas de mouvement dans ce lit, note un élève, rien ne bouge, c’est un mystère. »

On estime que 103 000 personnes sont venues la voir dans sa chambre (…) Chacun attend son tour dans la salle commune qui fait office de sas. On pénètre ensuite à tour de rôle dans la chambre où se tient parfois le P. Finet.

Une femme raconte à Marthe quelle joie elle se fait d’aller à un mariage. Elle décrit la manière dont elle s’habillera et dont elle semble fière. « J’aurai une robe de… ». Elle cite un grand couturier. « Les chaussures de…  et le chapeau de… ». Marthe imperturbable demande : « Et la petite culotte, elle est à vous ? »
Vivacité d’esprit, vigueur de la pensée, piquant de la répartie et profondeur du propos se mêlent admirablement…

Beaucoup témoignent : « Il n’y a aucune trace de jugement mais que de l’amour. » A écouter ou lire tous ces témoignages, on est saisi par autre chose : c’est la liberté de Marthe, celle qu’elle laisse et celle qu’elle manifeste. Pas de pression. Encore moins de menace. Ceux qui sont passés dans sa chambre affirment : « C’est un moment inoubliable ».

Marthe parle bien et juste. Elle sait se situer au niveau de ses visiteurs, ce qui rend si efficace sa conversation. Elle utilise merveilleusement cet art suprême qui est celui du silence.

Ceux qui la consultent ne reçoivent pas de solutions miracles clés en main, pas de prêt à penser ou à agir. Elle à une personne et à elle seule.

« Elle était merveilleusement attentive, intuitive, encourageante, enthousiaste, parlant avec pertinence des choses les plus hautes ou les plus communes, gentille et grave, enjouée, spirituelle en tous les sens du mot. » (Jean Guitton)

Combien de fois m’a-t-on affirmé : « C’est comme ma grande sœur ».

« Pour être saint, lit-on dans son journal intime, il faut aimer, aimer, aimer. La sainteté consiste dans l’amour actualisé dans chacune de nos actions du moment présent. » Elle ajoute : « Pas de médiocrité, pas de mi-hauteur sur un chemin plat (…) Il faut de jour en jour, de minute en minute, gravir un sommet nouveau, aller d’Ascension en Ascension (…)
La souffrance prend la valeur que lui donne celui qui souffre (…) Ne souffrons pas pour rien ! »
Elle constate dans journal intime que si elle a atteint « une vie nouvelle », c’est « dans un surcroît d’abandon et d’amour, plus que jamais livrée à l’action transformante de l’Esprit Saint. »

La malade prend sur elle pour répondre aux lettres en attente. Il y en a une vingtaine. Elle aura fini, notons-le, sa vie terrestre en terminant son courrier. Toutes les personnes qui se sont adressées à elle auront reçu une réponse…

L’intérieur de la bouche retient tout particulièrement l’attention des médecins. L’un deux dira qu’elle présente un palais de brochet.

Les écrits de Marthe comportent des passages nombreux et plus ou moins longs, qui ne sont pas d’elle et qui ne sont pas présentés pour autant comme des citations. Pourquoi a-t-elle agi de la sorte ? Ne risque-t-elle pas de passer pour une « faussaire, une menteuse, une fausse mystique qui s’attribue l’expérience de quelqu’un d’autre ? » s’interroge l’historien Joachim Bouflet.

« (…) corps souffrant mais glorifié, corps mutilé mais exalté, corps de pur désir et de nul besoin. » (Bernard Vandewielle, psychanalyste et ethno-analyste)

« L’âme est emportée, c’est étrange… Dieu se manifeste d’abord par la crainte. C’est si nouveau et si inexprimable. Puis on passe à une paix qui est un état, qui est au-delà du temps (…) c’est hors de soi et en soi. On a beau résister on est emporté par l’amour. » (MR)

« L’âme ne quitte pas le corps si vite qu’on ne le croit, et si l’on savait ce qui se passe alors, on se mettrait à genoux et on prierait pour le défunt de tout son cœur, plutôt que de se hâter de l’habiller. » (MR)

« C’est bien se vivre au jour le jour, dit-elle à un visiteur, mais c’est tellement plus beau de vivre la minute présente que le Seigneur nous donne. » L’enracinement dans l’immédiateté est une règle de conduite qu’elle redit souvent, car c’est à partir de là qu’on peut écouter l’Esprit. »

« Oh vous savez… Souffrir et offrir, c’est à portée de tout le monde. » (MR)

1 commentaire:

  1. ATTENTION !!! L'orateur de la photographie n'est pas l'auteur du livre que vous commentez ! MERCI d'éviter de confondre le professeur de journalisme et de communication d'Aix, qui écrit des monographies, notamment sur Marthe Robin, et le philosophe et théologien de Lyon (Homme et femme, l'altérité fondatrice, Cerf, 2008).

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