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samedi 18 janvier 2020

"Un homme et deux femmes" de Doris Lessing (1963)


Vous imaginez Judith. Assise sur son lit dans sa grande chambre blanche, pieds nus sur les dalles, elle contemple la chatte, en essayant de comprendre pourquoi une chatte italienne en bonne santé, sans inhibition et toujours nourrie des meilleures choses de la « rosticceria » peut bien être névrosée. Car elle l’est. Quand elle s’aperçoit que Judith l’observe, elle devient nerveuse et se met à se lécher le bas du dos.
(Notre amie Judith)

Ainsi donc, elle se trouvait gratifiée d’un amant et il avait une maîtresse ! […] Non, rien ne pourrait empêcher le quatuor de nouer d’inextricables relations, tempérées de courtoise indulgence, et enveloppées des dernières lueurs de passion automnale.
(La chambre 19)

Ils demeuraient là, elle allongée, lui debout. Elle se taisait. Elle l’avait tout simplement exclu de son univers. Il attendit quelque temps en silence. Il pensait : « Si je reste, il faudra bien qu’elle dise quelque chose. » Mais les minutes s’écoulaient sans qu’elle semblât y prendre garde ; la tension du dos, des cuisses, des bras, laissait seule deviner avec quelle impatience elle attendait qu’il partît.
(Une femme sur un toit)

De même que son mariage mélodramatique ressemblait finalement à celui de tout le monde – à cela près qu’il n’avait eu qu’une seule épouse, alors que beaucoup en étaient à leur deuxième ou troisième – ses dons d‘écrivain, ses efforts pour le devenir, le menaient là, dans ce « pub » ou dans d’autres semblables où tous les hommes avaient la même histoire. Ils avaient tous à leur crédit un roman, une pièce, un livre de poèmes, un moment de célébrité. Pourtant ils étaient là, à organiser des programmes de télévision dont ils se gaussaient (entre eux ou avec leurs femmes), ou à écrire des articles sur les livres des autres.
(A rayer de la liste)

Après avoir bien regardé l’objet et failli en mourir de confusion, je me suis approchée de la poubelle et j’ai voulu l’y laisser glisser. Mais rien à faire ! Il adhérait. Voilà que mon cœur, ce gros objet répugnant, rouge, palpitant, saignant, me colle aux doigts ! Que faire ? Je m’assis, j’allumai une cigarette (d’une main en tenant la boîte d’allumettes entre mes genoux) et, laissant pendre de côté la main où s’attachait le cœur, pour qu’il pût s’égoutter dans un seau, j’examinai la situation.
(Comment j’ai perdu mon cœur)

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