Nombre total de pages vues

mardi 3 novembre 2020

« Le suicide français » d’Eric Zemmour (2014)

Le triptyque soixante-huitard : Dérision, Déconstruction, Destruction, sapa les fondements de toutes les structures traditionnelles : famille, nation, travail, Etat, école (…)  L’heure venue, le Marché s’emparera sans mal de ces hommes déracinés et déculturés pour en faire de simples consommateurs.

Déjà en 1793, la condamnation à mort de Louis XVI, comme l’avait noté Balzac, avait guillotiné tous les pères. Mais Bonaparte, avec le Code civil, avait remis le père sur son trône. De Gaulle avait même réussi, au bout de cent cinquante ans de tâtonnements institutionnels, à le remettre à la tête de l’Etat. c’est ce travail séculaire de restauration qui a été saccagé (…)

Le général de Gaulle, avait demandé un enterrement modeste dans son village, un tombe humble à côté de celle où reposait sa fille adorée, sans fleurs, surmontée d’une croix de bois et de quelques pierres. Ni président, ni ministre, ni bureau d’Assemblée, ni corps constitués… Une messe simple sans discours. Il n'y eut pas de discours. Sans doute la seule volonté qui fut respectée (…) Cet hommage du monde entier était personnel puisque le Général avait quitté le pouvoir avant sa mort ; et qu’aucun régime protocolaire ne l’imposait (…)

De Gaulle est un lecteur de Bainville - « sauf pour la gloire, il aurait mieux valu que Napoléon n’existe pas » - qui jugeait toutefois que la gloire napoléonienne était éternelle et avait donné aux Français une haute d’image d’eux-mêmes, de leur valeur guerrière. « Quand la Grande Armée n’était composée que de Français, elle n’a jamais été vaincue », plastronnait-il (…)

De Gaulle était un homme du XIXè siècle qui avait connu l’héroïsme des poilus de 1914 (« des lions conduits par des ânes », disait les Allemands, admiratifs) (…) Ils furent admirés au-delà de tout par les chefs des puissances qu’ils combattirent. Waterloo n’empêcha jamais Wellington de glorifier « le maître des batailles » (…)

Nixon avait connu Eisenhower, Churchill, Adenauer et de Gaulle. « Tous les quatre étaient également des géants, disait-il. Mais c’est probablement le général de Gaulle qui eût la tâche la plus difficile : la France n’état pas morte, mais son âme était virtuellement morte. De Gaulle a pris en main la destinée d’un peuple dont l’âme était virtuellement morte (…) Seule sa volonté et sa détermination ont su garder cette âme en vie… »


(…) en rouvrant la Sorbonne sans conditions, le futur président [Pompidou] cédait et donnait à l’Etat une indélébile marque de faiblesse (…) « Politiquement, la nuit du 10 au 11 [mai 1968] constituait une catastrophe car elle cimentait l’unité factice des étudiants et de la majorité des enseignants contre la police et le gouvernement. » (Raymond Aron) (…) Le 30 mai, ses partisans descendaient en masse sur les Champs-Elysées, pour le soutenir, tétanisant ses adversaires ; seul de Gaule souffrit, en son for intérieur, de devoir le pouvoir à la rue - cette chienlit qu’il avait tant dénoncée - alors qu’il avait instauré la Vè République pour rétablir l’ordre et la souveraineté qu’il incarnait depuis le 18 juin 1940… « Le Général avait fort bien compris que cet extraordinaire succès… était la fin d’une certaine idée qu’il avait eue, lui, de la nation française. »


De Gaulle ne se doutait pas que la manne pétrolière puis gazière, découverte par les ingénieurs français sauvegarderait une Algérie corrompue et mal gouvernée des abîmes de la clochardisation, et aurait assuré à la France un destin royal d’émirat pétrolier, comparable à ce qu’avait été le charbon pour l’Angleterre au XIXè siècle.


(…) faisant basculer toute une génération - la plus nombreuse de l’Histoire de France - dans le camp d’un cosmopolitisme fossoyeur de l’indépendance nationale et fourrier d’une colonisation américaine qu’il avait combattue toute sa vie (…)

Mais avant même la mort du général, une décision législative, prise le 4 juin, annonçait déjà que « de Gaulle avait été le dernier père, et qu’après lui viendrait le temps des papas poussette. » (Philippe Murray).

(…) le général de Gaulle avait proclamé qu’avec la Vè République, il réglait une question vieille de cent cinquante-neuf ans ! En remettant la tête d’un père suprême sur le corps de la nation, il avait rétabli celle de tous les pères. Mais il avait lui-même sapé son œuvre de rétablissement en laissant les femmes, avec la fameuse loi Neuwirth autorisant la pilule en 1967, s’emparer du « feu sacré » de la procréation (…) Quand un député demanda ingénument à quel besoin répondait cette loi, le ministre de la Justice, Réné Pleven, répondit, non moins ingénument : « A introduire la notion de bonheur dans les familles. »


La vision d’une femme qui ne travaille pas est une déformation aristocratique ou bourgeoise. La femme a toujours travaillé et toujours réclamé la protection de son mari (…)

Le père incarne la loi et le principe de réalité contre le principe de plaisir. Il incarne la famille répressive qui canalise et réfrène les pulsions des enfants pour les contraindre à les sublimer. Sans le soutien de la société, le père n’est rien. A partir du moment où la puissance paternelle est abattue par la loi, la matriarcat règne.


(…) la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 (…) se situait dans le préambule de la Constitution : mais elle y était insérée (avec celle de 1946) comme une référence philosophique, pas comme un texte juridique (…)

Charles Pasqua (…) avait l’ambition de rétablir la souveraineté de l’Etat français sur les mouvements de population ; Badinter et le Conseil constitutionnel lui opposèrent le feu nourri des droits de l’homme. Les juges l’emportèrent (…) les majorités anticipent la censure du Conseil et arrachent elles-mêmes les projets qui risquent de déplaire aux grands prêtres du droit (…)

Dès qu’il était arrivé place Vendôme, le 2 octobre 1981, aussitôt après qu’il eut envoyé la guillotine à la casse, Mitterand avait, lui, décidé la reconnaissance par la France du recours individuel devant la Cour européenne des droits de l’homme. Chaque Français pourrait désormais attaquer son propre Etat devant une cour étrangère ! (…)

« Souvenez-vous de ceci : il y a d’abord la France, ensuite l’Etat, enfin, autant que les intérêts majeurs des deux sont sauvegardés, le droit » (de Gaulle). Depuis sa mort, nous avons retourné la pyramide : d’abord le droit, puis l’Etat, et enfin, quand elle n’est pas vouée aux gémonies, la France.


En 1979, Deng Xiaoping engage la modernisation de l’économie chinoise, qui rompt avec le collectivisme communiste…


On ne peut comprendre les raisons qui ont poussé Georges Pompidou à parrainer l’entrée de la Grande-Bretagne dans la CEE [en 1972], si on ne connaît pas celles qui avaient incité le Général à leur claquer la porte au nez, car ce sont les mêmes, mais retournées comme un gant. Dans cette affaire, Pompidou agit en anti-de Gaulle. Le Général considérait que les intérêts de l’Angleterre et du Marché commun étaient contradictoires. Les Britanniques ont l’habitude de s‘approvisionner en produits venus du monde entier, alors que le marché commun repose sur la politique agricole commune qui permet à l’agriculture française de nourrir ses voisins. Les Britanniques sont, depuis le milieu du XIXè siècle, de farouches partisans du libre-échange, alors que le Marché commun est protégé pa un tarif extérieur commun, symbole d’une préférence communautaire. « Sans la PAC et le tarif extérieur commun, il n’y a plus d’Europe », précisait de Gaulle à Peyrefitte. Or, Pompidou accepte que les Anglais conservent leurs échanges avec le Commonwealth ; et l’entrée de la Grande-Bretagne dans le Marché commun coïncide avec le début des grandes négociations commerciales qui abattront peu à peu toutes les barrières douanières de la forteresse « Europe ». ces négociations, les Américains les appellent des rounds, comme en boxe. L’Europe en sortira K.O.


La loi du 1er juillet 1972 ajoute à la liste « la provocation à la discrimination, à la haine, ou à la violence » visant certains personnes ou groupes de personnes « à raison de leur origine ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance à une ethnie, une nation, une race, ou une religion déterminée. » Les groupes de personnes désignés sont ainsi protégés contre la diffamation et l’injure, privilège qui n’était accordé par la loi de 1881 qu’aux corps constitués, armée, présidence de la République, etc (…) Ce principe de non-discrimination entre Français et étranger interdit toute préférence nationale ; (…) assimile le patriotisme au racisme ; interdit à un Français de préférer un compatriote à un étranger. La loi Pleven est potentiellement, sans que personne en ait pris conscience à l’époque, la dissolution programmée de la nation française dans un magma planétaire.


Mais l’émergence de l’homosexualité triomphante est d’abord liée à une évolution décisive du capitalisme. Du XIXè siècle jusqu’à la reconstruction d’après 1945, celui-ci avait privilégié l’épargne et l’investissement, mettant en avant les tempéraments austères et économes. La frustration sexuelle était une vertu ; la débauche, un gaspillage (…) Le patriarche est un piètre consommateur. Il faut détruire la virilité en l’homme pour que naisse et prospère sa pulsion consommatrice. L’univers homosexuel - surtout masculin - incarne alors - et encore aujourd’hui - le temple de la jouissance débridée, de la sexualité sans contrainte, de l’hédonisme sans limite (…) Ils sont, chez les hommes, les meilleurs et plus actifs consommateurs. Ils sont, à l’instar des femmes, un marché de prédilection. Les publicitaires ne tarderont pas à s’en apercevoir. Les Double Income No Kids (DINKS) sont leurs chéris (…) gay, plus flatteur : « Goods As You » (…) le lobby gay aux Etats-Unis est aujourd’hui financé par les plus grands capitalistes américains, Bill Gates et Steve Ballmer, Google, Facebook, eBay, ou un magnat des hedge funds comme Peter Singer. En France, Pierre Bergé, le patron d’Yves Saint Laurent, créera le journal Têtu dans les années 1970 avant de financer dans les années 1980 SOS Racisme (…) Cette babélisation généralisée…


L’écologie politique deviendra ce curieux  mouvement d’extrême gauche qui ne s’adresse qu’aux petits bourgeois urbains ; de contempteurs de la mondialisation qui haïssent les frontières ; de partisans de productions locales mais avec des étrangers accourus librement de la planète entière ; de défenseurs du principe de précaution pour la nature (nucléaire, OGM, gaz de schistes) mais pas pour l’homme (mariage homosexuel, adoption par les couples homosexuels) ni pour le pays (immigration massive, droit de vote et même éligibilité des étrangers) ; d’apôtres de la décroissance mondiale qui se prétendent tiers-mondistes (…) l’écologie est une sorte de ré-enchantement du monde répondant à la sécularisation rationaliste de l’Occident, la forme moderne d’un néopaganisme adorant la déesse Terre.


C’est à partir de cette inflexion majeure que les entreprises commenceront à regarder leur salarié non plus comme un consommateur potentiel dont il faut sans cesse augmenter le salaire (théorie fordienne) mais comme un coût qu’il faut sans cesse réduire.


Les banques privées empruntaient à la Banque centrale européenne à des taux dérisoires des sommes qu’elles prêtaient aux Etats à des taux prohibitifs…

(…) c’est Napoléon créant la Banque de France en 1800 sur le modèle de la Banque d’Angleterre fondée un siècle plus tôt, et dont l‘abondante création monétaire avait justement permis au royaume de financer les guerres cotre le Roi-Soleil (…)

Renonce à ses privilèges comme celui de battre monnaie (…) L’Etat finirait par abandonner ce droit régalien millénaire aux banquier centraux de Francfort, qui eux-même le confieraient aux banques privées. Il devrait désormais solliciter son banquier pour satisfaire ses besoins d’argent, comme un simple particulier (…)

Sur les six grands programmes industriels lancés au cours de cette décennies enchantée de 1960-1970, le spatial, le TGV, l’aéronautique, le nucléaire, les télécoms et le plan calcul, un seul échoua (le plan calcul) ; les cinq autres travaux d’Hercule de l’Etat façonnèrent les plus grandes entreprises françaises (France Telecom, Alcatel, Airbus, Areva, Alstom) et le socle industriel sur lequel repose encore aujourd’hui la fortune économique de notre pays.


« On peut se demander comment, dans ces conditions, les trois quarts des Juifs de France, ont pu échapper à la mort. » (Robert Paxton, dans son livre paru en 1973 : La France de Vichy) (…) Pourtant la question subsiste lancinante. Si ces Français (…) ont permis un sauvetage d’une telle ampleur, pourquoi les Hollandais et les Belges, nos voisins, n’ont-ils pu en faire autant ? Le nombre de juste hollandais est pourtant supérieur à celui des français ! Et les Juifs hollandais ont été exterminés à près de 100% (…) « Dans ses réactions aux pressions allemandes, le gouvernement de Vichy tenta de maintenir le processus de destruction à l’intérieur de certaines limites (…) Quand la pression allemande s’intensifia en 1942, le gouvernement de Vichy se retrancha derrière une seconde ligne de défense. Les Juifs étrangers et les immigrants furent abandonnés à leur sort, et l’on s’efforça de protéger les Juifs nationaux. Dans une certaine mesure, cette stratégie réussit. En renonçant à épargner une fraction, on sauva une grand partie de la totalité » (Raul Hilberg, spécialiste mondial de l’extermination des Juifs, in « La Destruction des Juifs d’Europe », 1961) (…) Paxton avait relevé le refus de Pétain que les Juifs portent l’étoile jaune en zone libre ; Michel s’étonne, faussement naïf, qu’on ne lui en sache pas gré alors qu’on en rend un éternel hommage du roi du Danemark.


Le sociologue et politologue Robert Putnam - repris et cité des années plus tard par Christophe Guilluy dans son livre Fractures françaises - analysera bientôt sans fard ni tabou les bouleversements entraînés par une société américaine déjà multiculturelle. Il évoque le dépérissement de ce qu’il appelle le « capital social », c’est-à-dire les éléments de la vie collective dans les villes multiculturelles.


(…) ce sont les femmes qui - à 80% - enclenchent la procédure de divorce (…) Ce sera le destin paradoxal des féministes que d’accomplir les rêves d’irresponsabilité absolues de générations de prédateurs mâles contre lesquels elles vitupèrent sous le terme méprisant de « machos » - plus besoin de se marier pour coucher, divorce aux confis de al répudiation, avortement libre - au nom de la liberté des femmes (…) On évalue à 30% la perte de pouvoir d’achat à l’issue d’un divorce. Les femmes en sont les premières victimes (…)

« En dissolvant les nationalités, l’économie libérale fit de son mieux pour convertir l’humanité en une horde de bêtes féroces - les concurrents sont-ils autre chose ? - qui se dévorent mutuellement parce que les intérêts de chacun sont égaux à ceux de tous les autres. Après ce travail préliminaire, il ne restait pus à l’économie libérale qu’un pas à faire pour atteindre son but : il lui fallait encore dissoudre la famille. » (Karl Marx) (…)

Cette désintégration familiale traduit la volonté de la génération soixante-huitarde de ne pas transmettre l’héritage qu’elle avait reçu…


Le ministre finirait par obtenir le vote de sa chère « loi Royer ». Il avait gagné une bataille, mais perdrait la guerre. Quarante ans plus tard, partout en France : images de désolation, ruines d’après-guerre ; les entrées des villes abîmées, enlaidies, avilies par des blocs d’usine déposés à la hâte, ; des files ininterrompues de panneaux publicitaires aux couleurs criardes ; des immenses étendues de voitures immobilisées qui chauffent au soleil. Le sud de la France, et ses sublimes paysages dépeints par Giono, est particulièrement saccagé (…) 

Les petits commerçants avaient été, avec les paysans, les bien-aimés de la France radicale. La IIIè République avait privilégié depuis les années 1880 le petit commerce au détriment des grands magasins et des succursales multiples. A la veille de la Seconde guerre mondiale, le nombre de petits patrons du commerce et de l’industrie s’était accru, alors que la population avait très peu augmenté. On accusa cette prédilection « rad-soc » pour les petits d’avoir empêché la modernisation économique du pays et d’être la cause profonde de la défaite militaire de juin 1940 face à la machine industrielle germanique.

(…) les élus locaux (…) étaient en rivalité les uns avec les autres. Une commune qui refusait une grande surface voyait la voisine accepter ; sa base fiscale s’effondrait, les consommateurs accouraient avec leurs chariots, ruinant quand même les commerçants de son centre-ville (…)

Trois millions de salariés travaillent dans la grande distribution (20% des emplois privés). Ils créent entre 10 000 et 20 000 emplois par an. Et tant pis si trois emplois de proximité sont détruits pour un emploi créé dans la grande distribution ! (…)

Nous importons 40% de nos besoins alimentaires.


Giscard s’efforce de tirer la leçon politique de l’évolution sociologique de la France qui, à l’issue des Trente Glorieuses, voit l’émergence d’une immense classe moyenne, reposant sur la montée en puissance d’un secteur tertiaire qui dépasse, pour la première fois en 1975, la part du monde ouvrier (…) 

Dans un dialogue éblouissant avec Jacques Peyreffite (…) le président Pompidou exposait dès 1969 avec une rare lucidité sa réponse conservatrice - au sens le plus élevé, celui de Disraeli : « Je suis conservateur car je garde ce qui est bon et je change ce qui est mauvais. » - : « Vous n’avez pas remarqué que dans ce discours où Chaban parle tant de société, il ne parle pas une seule fois de la nation, et encore moins de l’autorité de l’Etat ? On dirait que ces expressions lui écorchent la langue. Or, la France est une nation avant d’être une société. Elle n’a été créée, n’a survécu, que comme nation. Et cette nation n’a été sauvée que par son Etat. De nouveau, aujourd’hui que la société se décompose sous nos yeux sans que nous y puissions presque rien, au moins respectons et protégeons ce qui tient encore, et qui peut seul nous tirer d’affaire : l’Etat et la nation. » (…)

Giscard connaîtra ainsi le destin tragique de Louis-Philippe qui n’avait été qu’une transition monarchique vers la République. Comme le « Roi des Français » fut le premier des républicains, le « libéralisme avancé » de Giscard fera le lit d’une nouvelle société qui, émancipée des carcans de la tradition, ne pouvait que se donner à la gauche.


Simone Veil a pourtant toujours affirmé pendant les débats sa détermination en faveur d’une « loi dissuasive » qui conserverait à l’avortement son caractère « d’exception » (…) Michel Debré ne votera pas ce texte d’un gouvernement de Jacques Chirac qui appartenait pourtant au même mouvement gaulliste (…) Il rappelle que « le rôle du législateur n’est pas de suivre l’évolution des mœurs ». En vain (…) Quarante ans après la loi, il y a toujours en moyenne 200 000 avortement par an, malgré la généralisation de la pilule (spécificité française) (…) Debré et ses rare épigones d’aujourd’hui oserait la macabre comptabilité des 8 millions de vies françaises perdues (200 000 par 40)…


On connaît la célèbre formule de de Gaulle sur son village qui deviendrait « Colombey-les-Deux-Mosquées ». On connaît moins la suite du propos lorsqu’il compare les Français et les Arabes à l’huile et au vinaigre : « Mélangez-les dans une bouteille. Après un certain temps, ils se séparent. » (…) 

« La civilisation avance sur la barbarie ; un peuple de lumière tend la main à un peuple dans la nuit », assène, lyrique, Victor Hugo au général Bugeaud qui, en 1840, dans Choses vues, rechigne encore à « pacifier » l’Algérie à peine conquise (…) pour lui, « les Français sont des Français, les Arabes sont des Arabes. Ceux qui croient à l’intégration ont des cervelles de colibri, même les plus brillants. »(…)

Le président algérien Boumediene avait pourtant prophétisé en 1974 : « Un jour des millions d’hommes quitteront l’hémisphère Sud pour aller dans l’hémisphère Nord. Et ils n’iront pas là-bas en tant qu’amis. Parce qu’ils iront là-bas pour le conquérir. Et ils le conquerront avec leurs fils. Le ventre de nos femmes nous donnera la victoire. »


L’internationalisme de la gauche a rompu avec le patriotisme de la Révolution française après la guerre de 1914. Déjà, dans l’entre-deux-guerres, Aragon et les surréalistes conchiaient le drapeau tricolore, l’hymne national et l’armée française ; héritier d’Anatole France qui avait affirmé : « On croit mourir pour la patrie et on meurt pour les industriels. »


(…) pour mieux confirmer leur réputation de conceptuels fascinés par les mots et la politique, de cerveaux méprisant et dédaignant leurs corps, cette éducation française qui avait déjà coûté si cher au pays, si l’on en croit le mot célèbre de Wellington : « La bataille de Waterloo a été gagnée sur le terrain de sport d’Eton. »


(…) le général de Gaulle installa rue de Grenelle son ancien ministre de l’Information, Alain Peyrefitte (…) Alain Peyrefitte était certes un brillant normalien, un des derniers intellectuels du gaullisme au pouvoir ; mais il se piquait de modernité en matière de pédagogie (…) Dans son livre, Le Mal français, qui parut aussi en 1976, Peyrefitte intègre ce modernisme pédagogique dans une critique de la France traditionnelle, catholique, rigide, hiérarchisée. Il dénonce la société bloquée et rêve de la transformer, de l’américaniser, de la protestantiser (…) Le culte de l’enfant, de sa spontanéité, le passage de la transmission du savoir détenu par le maître à une pédagogie active qui fait de l’enfant « l’acteur de la construction de ses savoirs » détruiront l’école primaire française qui s’enorgueillissait à juste titre d’être la « meilleure du monde ».


La liste conduite par Jacques Chirac aux élections européennes de 1979 obtint 16% des suffrages. Le président du RPR renvoya ses deux conseillers, auteurs de ce texte magnifique, Pierre Juillet et Marie-France Garaud. Il fit dire par la suite qu’ils avaient profité de sa faiblesse (il était à l’hôpital à la suite d’un accident de voiture) pour lui faire avaliser ce désormais célèbre appel de Cochin.


Valéry Giscard d’Estaing avoua des années plus tard que le président américain Jimmy Carter l’avait prié de recueillir et de protéger l’imam Khomeini qu’il qualifia de « saint homme » tandis que le journal Le Monde évoquait le « Gandhi iranien ». Khomeini avait désigné par le Time homme de l’année 1979, après avoir pu, de sa retraite dorée à Neauphles-le-Château, organiser la chute de son ennemi juré, le shah d’Iran (…) 

En 1979, Michel Foucault s’avança aux côtés de la révolution iranienne (…) Le 12 mai 1979, quand il s’interroge en une du Monde, faussement ingénu, « Inutile de se soulever ? », la révolution de Téhéran a déjà du sang sur les mains. Il ne se refuse pas moins à « disqualifier le fait du soulèvement parce qu’il y a aujourd’hui un gouvernement de mollahs. » La révolution est bonne en soi.


Ce ne sont plus les ressources du sous-sol qui déterminent désormais l’allocation des richesses, mais les flux de marchandises et de capitaux. Les pays noirs sont trop loin des ports et des grandes villes, qui deviendront bientôt des métropoles.


Sartre accueilli dans l’ancien bureau du général de Gaulle par un Giscard révérencieux et intimidé : « Bonjour, maître. » (…) Cet homme avait affiché une inflexibilité et une insensibilité ostensibles, avec d’autant plus d’acharnement sans doute qu’il n’avait pas montré pendant la guerre de ce courage physique ni même intellectuel qui fit les héros et les résistants, flirtant avec une collaboration au moins passive, au cours de cette Occupation où, si on l’en croyait, « on n’avait jamais été aussi libre » ; libre de découvrir les plaisirs défendus de l’« embarquement pour Cythère. »


3 octobre 1980. Les loups sont entrés dans Paris par la rue Copernic.

Depuis la guerre des Six Jours en juin 1967, une partie de la jeunesse française s’était enrégimentée dans des mouvements de défense sioniste. Elle militait, faisait le coup de poing dans les rues et les universités contre des nazis imaginaires. Elle connaissait le destin tragi-comique de ces générations perdues, si bien analysé par Musset dans ses Confessions d’un enfant du siècle, qui arrivent trop tard dans un monde trop vieux, et rêvent de vivre une époque de bruit et de fureur qu’ils n’ont pas connue (…) les jeunes juifs des années 1970, qui s’imaginaient tuer des nazis dans le maquis avec Jean Moulin ou dans le ghetto de Varsovie, renversèrent la statue de Giscard. On reprocha à ce dernier de n’avoir pas daigné se déplacer. On murmura de plus en plus fort qu’il était resté comme Louis XVI à la chasse. On psychanalysa sans se lasser la formule maladroite du premier ministre Raymond Barre pour lui découvrir un insoutenable inconscient antisémite : « Cet attentat odieux voulait frapper les Israélites qui se rendaient à la synagogue et a frappé des Français innocents qui traversaient la rue Copernic. » (…) Ce fut le génie tacticien de François Mitterand que de diriger la foudre sur un président de la République qui n’en pouvait mais (…) L’évidence finit par s’imposer d’elle-même même aux plus rétifs : des Palestiniens avaient organisé le carnage.


Tout au long de sa brillante carrière, BHL s’illustrera par sa constance véhémente à dénoncer tout retour de l’odieux patriotisme, toujours assimilé au nazisme. BH se voudra le héraut des droits de l’homme à travers le monde, combattant partout pour les peuples opprimés, des Bosniaques aux Lybiens, mais jamais pour les Français. « Méfiez-vous de ces cosmopolites qui vont chercher loin dans leurs livres des devoirs qu’ils dédaignent de remplir autour d’eux. Tel philosophe aime les Tartares pour être dispensé d’aimer ses voisins » (Emile, Livre I), nous avait prévenu Jean-Jacques Rousseau, avant d’ajouter : « L’essentiel est d’être bon aux gens avec qui l’on vit. »


Au moins, lors des législatives de 1978, la gauche avait-elle perdu. Moscou en avait été satisfait, qui avait toujours privilégié le candidat de la droite gaulliste, soucieux d’indépendance par rapport aux Etats-Unis et d’équilibre des blocs ; même Giscard, le centriste, fut préféré aux socialistes, toujours soupçonné de céder à la tentation atlantiste (…) Comme le général de Gaulle, les communistes avaient compris que la construction européenne n’état que le cache-sexe de la Pax americana et de la fin de la souveraineté nationale (…) Lors des Européennes en 1979, les communistes mènent l’assaut contre l’Europe des marchés au nom de la souveraineté nationale, nouant, lors des débats télévisés, une complicité idéologique et même personnelle (…) avec les RPR Chirac et Debré (…) Cette première campagne européenne sera la dernière manifestation de l’alliance scellée pendant la guerre entre gaullistes et communistes (…)

Georges Marchais publiait en une de l’Humanité du 6 janvier 1981 une longue lettre qu’il avait envoyée au recteur de la mosquée de Paris : « (…) Ainsi se trouvent entassés dans ce qu’il faut bien appeler des ghettos, des travailleurs et des familles aux traditions, aux langues, aux façons de vivre différentes. Cela crée des tensions et parfois des heurts entre immigrés des divers pays. Cela rend difficile leurs relations avec les Français. Quand la concentration devient très importante (…) la crise du logement s’aggrave ; les HLM font cruellement défaut et les familles françaises ne peuvent y accéder. Les charges d’aides sociales pour les familles immigrées plongées dans la misère deviennent insupportables pour les budgets des communes peuplées d’ouvriers et d’employés. L’enseignement est incapable de faire face, et les retards scolaires augmentent chez les enfants, tant immigrés que français. » (…) Il reprit ce thème à chacun de ses meetings au cours de la campagne présidentielle de 1981 (…) Mais les communistes se retrouvèrent seuls. La presse de droite, Le Figaro, et de gauche, Libération, dénoncèrent de concert « le racisme du PC. » (…) Dans un de ses livres, L’Espoir au présent, Marchais écrit : « (…) J’ai constaté également combien les français et les Françaises ont la passion de l’Histoire de France (…) L’Histoire nous donne des matériaux, des enseignements pour réfléchir sur le présent et le transformer. C’est ce que craint Monsieur Giscard d’Estaing qui prétend que nous sommes rentrés dans un « monde sans mémoire » et fait tout pour affaiblir l’enseignement de l’Histoire de France à l’école. Cette Histoire, nous y tenons. Elle nous apprend que la France est l’une des plus anciennes nations de la Terre. Elle s’est constituée ici, à l’ouest du continent européen, au carrefour des grands courants humains, dans un mouvement qui a duré des siècles. »


Depuis la Charte d’Athènes, dans les années 1930, des architectes communistes ou communisants - pour la plupart français - ont élaboré un urbanisme de tours édifiées autour de dalles ; des espaces clos aux allées perpendiculaires, où rien ni personne n’entre ni ne sort hors du contrôle du secrétaire de cellule du Parti. Tout est aisément surveillé. Au pied des tours, les concierges sont l’œil de Moscou.


Chateaubriand avait été prophète en 1840 : « Détruisez le christianisme et vous aurez l’islam. »


(…) l’invention par Intel du premier microprocesseur en 1971 (…) le lancement de l’Apple II en 1977 (…) Comme pour l’avion ou l’automobile, les ingénieurs français avaient été au rendez-vous ; mais pas les commerçants ni les industriels (…) 

Le déclin de la France débuta en ce début du XVIIIè siècle avec le traité de Paris de 1763, qui vit s’imposer au firmament la nouvelle puissance industrielle, à l’époque la seule : la Grande-Bretagne (…) 

L’informatique encourage une décentralisation, une dispersion du pouvoir du décision contraire à notre tradition. Les hiérarchies intermédiaires sont dépassées, l’autorité doit se transmuer en animation. C’est le règne du cool, du (faux) sympa qui se trouve être un vrai tyran…


Dans le passé, la naissance des collectivités locales s’étaient adossée au mode de déplacement de l’époque. La commune du Moyen-Age accueillait le paysans se déplaçant à pied ; le chef-lieu du département recevait le citoyen de la Révolution à une journée de cheval (…) La région représentait donc l’échelon adapté au temps de l’automobile (…) Ironie de l’Histoire : le département fut le comble de la modernité en 1789 et le comble de la ringardise deux siècle plus tard. La région incarnait l’apogée de la réaction en 1789 (les Provinces) et du progrès dans les années 1970. A l’orée des années 2000, elle passera de nouveau à la trappe de l’Histoire, tandis que les villes, ces modernes du Moyen Age, reprendront el flambeau (…)

Pour compenser la multiplicité des communes (les fameuses 36 000 communes, autant que dans tout le reste de l’Europe), on créa des communautés de communes (…) Mais si on créait de nouvelles structures, on n’en supprimait aucune. Les effectifs partout gonflaient.


Les pseudo-héritiers de Tocqueville n’avaient pas lu ces pages lumineuses dans lesquelles l’auteur de La Démocratie en Amérique distingue entre décentralisation politique et décentralisation administrative, la seconde étant bénéfique car elle favorise l’initiative locale et le dynamisme économique, tandis que la première est néfaste car elle démantèle la souveraineté nationale (…) « Il y a eu déjà l’Europe des régions ; ça s’appelait le Moyen âge ; ça s’appelait la féodalité » (le président Pompidou).

A l’instar de l’Italie, du Canada ou de l’Espagne, la France connut la criminalisation des marchés locaux ; les mafias internationales ou même nationales inspirèrent notre milieu corso-marseillais qui se mêla à son tour des contrats sur le traitement des ordures, des cliniques privées, des officines de sécurité, sans parler des traditionnels marchés immobiliers et routiers (…) Le maire de Marseille, Gaston Defferre, savait mieux que personne que seul le gaullisme industriel, sa politique d’aménagement du territoire et son organisation d’assistance sociale dirigée de Paris, avait permis aux forces politiques locales d’échapper aux logiques clientélistes et de s’arracher des bras trop affectueux de la pègre. C’est aussi la centralisation parisienne de la construction immobilière qui lui avait donné les moyens de réaliser son ambitieux programme de logements sociaux au cœur de sa ville, sur le vieux port, qui ne vit jamais le jour à Naples ou à Palerme, dans une Italie postfasciste plus décentralisée, et donc plus soumise aux diverses « influences » locales. Ne parvenant plus à rendre les mêmes services à la population, les parrains marseillais perdirent leur influence politique et se recyclèrent dans les grands trafics internationaux, de drogue en particulier, avec la célèbre french connection, qui faisait l’admiration des mafieux calabrais et napolitains.


Les troupes françaises affichaient les qualités éternelles qu’avaient déjà remarquées Jules César : audace, intrépidité, créativité. Leurs défauts aussi : une naïveté, une ingénuité quand l’ivresse du jeu les emporte, leur fait oublier les disciplines indispensables au combat. Les Allemands avaient hérité des vertus de rigueur, d’abnégation, de discipline, et de détermination inébranlable, de volonté farouche d’écraser l’adversaire, qui avaient la gloire du drill prussien sous Frédéric II (…) Schumacher avoua des années plus tard que toute l’équipe avait pris de l’éphédrine, drogue qui renforce l’agressivité.


Lorsque Jacques Delors fut nommé à la tête de la Commission européenne en 1985, Pascal Lamy le suivit à Bruxelles et mit au point l’Acte unique européen qui instaurait la liberté totale à l’intérieur de l’Union européenne des mouvements de capitaux, de marchandises et d’hommes (…) Parvenu à la tête du FMI, Michel Camdessus (la Pythie de Fabius !) étendit ces principes libéraux à toute la planète. C’est ce « consensus de Paris » et non le plus tardif quoique plus célèbre « consensus de Washington » de 1989, qui consacrait les prémices de la mondialisation, avant même que le fameux couple internet-porte-conteneurs ne lui donnât une ampleur inégalée. C’est l’Europe qui avait précédé le monde et non le monde qui avait subverti l’Europe. Ce fut un quarteron de hauts fonctionnaires français qui imposa cette vision à l’Europe et au monde, contrairement à notre tradition protectionniste (et à nos intérêts nationaux ?) (…) 

Ils avaient créé dès 1982, en compagnie d’hommes d’affaires et d’intellectuels de centre-gauche (Pierre Rosanvallon, Jacques Julliard), la fondation Saint Simon pour imposer leurs idées au sein des élites françaises. Le comte de Saint Simon (…) avait, au XIXè, porté un vaste mouvement scientiste et industrialiste qu’on appellerait aujourd’hui technocratique : « L’administration des choses remplacera le gouvernement des hommes », avait-il prophétisé (…) Nos dirigeants, de gauche mais aussi de droite, adopteraient désormais la manie allemande d’éviter le mot pouvoir (Macht, aux résonances hitlériennes en langue allemande), lui préférant la hideuse expression « aux responsabilités ». Le mot « gouvernance », emprunté au vocabulaire des entreprises, remplaça « gouvernement ».


Dans Cool Memories, Jean Baudrillard écrivait : « SOS racisme et SOS baleines. Ambiguïté : dans un cas, c’est pour dénoncer le racisme, dans l’autre, c’est pour sauver les baleines. Et si dans le premier cas, c’était aussi un appel subliminal à sauver le racisme… » (…)

(…) on travestit l’adversaire sous les frusques usées du « fasciste », selon l’ancienne consigne de Staline à la IIIè Internationale (…) Cette main jaune (…) elle rappelle  la fois l’étoile jaune que les juifs devaient porter en zone occupée et la main de Fatima, porte-bonheur islamique (…)

A la une du premier numéro du journal Globe, mensuel de gauche antiraciste d’obédience mitterrandienne, fondé en novembre 1985 par Georges-Marc Benamou, aidé financièrement apr Pierre Bergé et Bernard-Henri Lévy, on pouvait lire en guise de profession de foi : « Bien sûr, nous sommes résolument cosmopolites. Bien sûr, tout ce qui est terroir, béret, bourrée, binious, bref franchouillard ou cocardier, nous est étranger voire odieux. »

(…) l’historien Pierre Milza a évalué à près de deux tiers le pourcentage d’Italiens, venus dans notre pays entre 1870 et 1940, repartis dans leur pays d’origine.


(…) sans oublier la réprobation de la Cour des comptes qui dénonçait leur gestion dispendieuse, obligèrent les dirigeants de SOS Racisme à se replier sur leur « cœur de métier » : la collecte inlassable de subventions.


Le génie des pionniers de l’ORTF avait été de réaliser des programmes avec peu d’argent pour le plus grand nombre ; le génie de Canal + serait de produire des programmes avec beaucoup d’argent pour peu de gens. Mais ses objectifs initiaux, volontiers élitistes, conduisirent la nouvelle chaîne sur la pente d’une ruine rapide, dont elle ne réchappa in extremis que par l’arrivée, accueillie avec enthousiasme par les abonnés, du cinéma pornographique et du football (…) Canal + mettait en lumière ces « rebellocrates » brocardés plus tard par Phillippe Murray, qui essaimeront ensuite partout jusqu’à dominer le paysage médiatique français (…) Canal + devint la chaîne de Hollywood et de la banlieue, tenant la mondialisation par les deux bouts ; la chaîne qui concrétisait médiatiquement l’alliance des libéraux et des libertaires. La chaîne de la langue anglaise et du langage « zyva »…


En 1807, Napoléon réunit le grand Sanhédrin (une première depuis l’Antiquité !), qui rassemblait des rabbins mais aussi des laïcs. Il leur posa douze questions concernant le mariage, la citoyenneté, le pouvoir rabbinique et les relations économiques avec les non-Juifs. L’objectif de l’Empereur (…) était de privatiser la loi juive, de la soumettre au code civil (…) et des transformer les membres de la « nation juive » en citoyens français. Le Sanhédrin joua le jeu napoléonien au-delà de toute espérance. Ne s’adressant pas seulement au Juifs français, mais aux Juifs du monde entier, comparant Napoléon à un nouveau Cyrus envoyé par Dieu pour sauver Israël, il somma tous les juifs de se soumettre au Code civil. Il autorisa même les soldats juifs de la Grande Armée à ne pas respecter les lois de la nourriture casher en cas de nécessité (…)

Ces Ashkénazes débarquèrent en masse en France dans les années trente (la France fut le pays au monde) loin devant les Etats-Unis qui en accueillit le plus grand nombre (…) Ce sont ces Ashkénazes résistants pendant la guerre, issus des groupes socialistes, bundistes, communistes, sionistes, qui fondèrent le CRIF en 1944, comme pour se démarquer d’un Consistoire qu’ils jugeaient trop français, trop israélite, trop compromis avec Vichy. Très vite, ils abandonnèrent ce mot israélite, pour retrouver le vieux vocable de juif, transformant le Conseil représentatif des Israélites de France en Conseil représentatif des institutions juives de France (…) les Ashkénazes tenaient les institutions officielles, quand les Marocains, plus pieux, investissaient les synagogues (…) En cette même année 1985, Claude Lanzmann imposait par le cinéma le mot shoah qui remplaçait « holocauste » ; un mot hébreux à la place d’un vocable français pour mieux enraciner le caractère à la fois unique et juif du génocide qui devint un élément central - parfois obsessionnel - de la psyché juive, faisant des Juifs français une caste d’intouchables, et du génocide la nouvelle religions obligatoire d’un pays déchristianisé.


En organisant de mariage « pour de rire », Le Luron se gaussait de son ancien amant Yves Mourousi, qui s’apprêtait à convoler en justes noces quelques jours plus tard avec Véronique Audemard d’Alençon. Le présentateur du journal de TF1 était réputé pour sa participation active aux folles nuits du petit monde de l’homosexualité parisienne (…) L’hypocrisie fut qualifiée de bourgeoise (comme si le peuple agissait autrement) pour mieux la déconsidérer (…) 

Les passions étaient jadis dangereuses et destructrices ; elles devenaient désirables, respectables (…) 

Le mariage lui-même avait été transformé en contrat à durée déterminée indexé sur les sentiments - et, encore plus fragile, le désir ; la norme se rapprochait des comportements de la marge (…) les gays imposent à une société sidérée leur modèle culturel et symbolique (…)

Les féministes voient, dans cette contestation des identités sexuelles, la seule manière d’abattre le pouvoir du mâle ; les homosexuels militant y voient l’unique moyen de sortir de la marginalité (…)

« Il n’y a aucune différence entre un ouvrier qui loue ses bras et une femme qui loue son ventre » dira, en plein débat sur le mariage homosexuel instauré par Christiane Taubira en 2013, Pierre Bergé, patron d’Yves Saint Laurent, qui incarnera avec une rare arrogance la puissance du nouveau pouvoir gay, fondé sur le marché et la tolérance (…) L’objectif révolutionnaire sera clairement affiché par un sociologue comme Eric Fassin, militant engagé, dans Homme, femme, quelle différence ? : « Ce qui est en cause, c’est l’hétérosexualité en tant que norme. Il nous faut essayer de penser un monde où l’hétérosexualité ne serait pas normale. »


Chez nous, la solidarité est assurée par l’impôt et les organismes de redistribution qui évitent le choc des humiliations entre un donateur et son récipiendaire (…) Tout au long d’une carrière chaotique, Coluche afficha un nihilisme féroce et impitoyable qui cachait un désespoir existentiel jamais apaisé par l’usage des drogues et la démesure consumériste.


Dans le monde colbertiste hérité du général de Gaulle, l’industrie est une annexe de l’Etat. Les revenus des hauts fonctionnaires du « public » sont alors du même ordre que ceux des dirigeants du « privé ». Cela est particulièrement vrai pour la « Régie », nationalisée à la libération pour punir son fondateur Louis Renault de sa « collaboration économique », et devenue à la fois la quintessence du dirigisme de l’Etat gaulliste et sa vitrine sociale (…)

50% de la valeur des principaux groupes du CAC 40 en 2014 se retrouvent entre des mains étrangères  (…) les entreprises du CAC 40 réalisent les trois-quarts de leur chiffre d’affaires hors de France. La croissance de leurs revenus reposent à 85% sur leurs implantations à l’étranger. Les grands fonds de pension anglo-saxons sont devenus des actionnaires majeurs de grands groupes français ; les fonds souverains de Norvège mais aussi du Qatar ont suivi (…) La France a toujours souffert d’un manque chronique d’investisseurs à long terme, car l’épargne abondante préfère l’immobilier à l’entreprise (…)

Aujourd’hui un consommateur patriote se doit d’acquérir une Toyota Yaris fabriquée à Valenciennes plutôt qu’une Renault Clio qui vient probablement de Turquie (…)

Comme disait Louis-Philippe désabusé en son exil londonien, après les journées de juin 1848 qui virent le général républicain Cavaignac massacrer les ouvriers révoltés : « La République a de la chance, elle peut tirer sur le peuple. » (…)

A la Régie, au temps de Pierre Dreyfus, on respectait la tradition de la « pyramide inversée » : les bas salaires étaient plus élevés qu’ailleurs ; et les hauts revenus réduits. L’échelle des revenus étaient contenue entre 1 et 10. Pierre Dreyfus touchait un salaire de hait fonctionnaire (sans doute l’équivalent de 10 000 euros) ; sa voiture de fonction avec chauffeur constituait son principal luxe (…) Le salaire de son successeur Carlos Ghosn (qui cumule les casquettes de Renault et Nissan) atteint les 10,9 millions d’euros. C’est 606 fois le salaire d’un employé de Renault à 18 000 euros bruts annuels (…) ces « élites sans patrie qui ont fait allégeance à la mondialisation économique et à leur propre prospérité plutôt qu’aux intérêts de la nation où elles vivent », selon le mot cruel mais juste de Larry Summers, ancien conseiller cynique de Bill Clinton et de Barack Obama.


L’art contemporain est pris dans une infinie surenchère de la laideur. Défigurer, c’est figurer. Ce nihilisme éradicateur traduit en profondeur un refus d’hériter et de poursuivre ; l’hubris folle d’un créateur démiurge qui réinvente l’art dans chaque œuvre ; l’art comme ultime moyen de salir et saccager toute trace du passé (…)

Quelle que soit la majorité au pouvoir, on ouvre les musées, les galeries et les monuments historiques les plus prestigieux et les plus élégants, comme le château de Versailles, à la laideur et à la vulgarité moderniste, afin de « faire dialoguer les œuvres et les époques ». L’Etat français se met à la remorque et au service de l’art contemporain devenu spéculatif, enrichissant ainsi quelques artistes retors qui savent flatter la vanité de nouveaux riches se donnant l’allure des mécènes éclairés de jadis.


Ce redoutable peloton de voltigeurs motorisés, encagoulés et casqués, et armés d’une longue matraque, le « bidule », avait été créé après les « évènements » pour permettre à la police de réagir contre les « casseurs », trop agiles pour les CRS traditionnels (…)

Dray et ses compères trotskistes s’étaient mis au service de François Mitterrand lors de sa cohabitation conflictuelle avec son Premier ministre (…) 

La mort de Malik Oussekine conduisit Jacques Chirac à la reddition complète ; une capitulation sans conditions. Il renonça à la loi Devaquet ; et enterra le code nationalité sous le traditionnel catafalque d’une commission. Il dissout le corps des voltigeurs.


1988 (…) le président Mitterrand réélu (…) avait accouché du rétablissement de l’ISF (impôt sur la fortune qui avait été supprimé par Jacques Chirac) pour financer le RMI (revenu minimum d’insertion). Les spécialistes de la dépense publiques avaient souri avec mansuétude : ils savaient, eux, qu’il est interdit d’affecter une dépense à une recette.


(…) une déclaration des droits à destination de tous les hommes (…) on avait vu dans cette générosité française une supériorité sur la Révolution britannique ou même la Déclaration d’indépendance américaine qui nous avaient précédés, mais avaient confiné l’espace de la liberté aux peuples anglo-saxons (…)

Revenu de ses engagements communistes de jeunes, le brillant historien [François Furet] ne s’arrête pas, comme nombre des apostats en religion marxiste, aux errements sanguinaires du stalinisme mais, se souvenant sans doute que Trotski et Lénine admiraient la Révolution française et en particulier la période de la Terreur, traque sans pitié les sources du totalitarisme dans sa matrice robespierriste (…)

« La France est déjà le pays du cartésianisme, ou ce qu’il est devenu dans le langage commun, c’est-à-dire l’abstraction universaliste. Si on y ajoute le moralisme abstrait du protestantisme, que reste-t-il ? Rien. » (Jacques Julliard, dans son Histoire des Gauches) (…) La contestation du Pape, et donc de Dieu, par Luther, le droit pour les individus de discuter de choses sacrées, fut la mère de toutes les dissidences, de toutes les révolutions, et sapa à sa base les fondements de l’autorité et de l’unité du pays (…)

Le jeune Bonaparte n’a jamais celé son admiration pour l’Incorruptible ; et son amitié pour Augustin Robespierre, son frère exécuté lui aussi le 9 thermidor, lui valut quelques ennuis au début du Directoire.


En cette année 1989, la Chine forge un nouveau modèle, si l’on excepte les dictatures sud-américaines (Chili de Pinochet) où la liberté économique est associée à la tyrannie politique. Cette alliance unique dans l’Histoire deviendra très vite un paradigme idéologique d’une efficacité redoutable, à la grande joie des multinationales occidentales, qui exploitent sans vergogne les millions d’esclaves mis à leur disposition, et des dictateurs d’Afrique et d’Asie qui n’entendent plus recevoir les leçons de morale de l’Occident. Cette transgression chinoises rend caduques toutes les théories françaises et anglaises selon lesquelles le libéralisme économique s’accompagnerait inéluctablement de sa version politique des droits de l’homme, démocratique et libérale.


Au bout de quinze ans de tergiversations, le président Jacques Chirac osa en 2004 interdire le voile islamique à l’école. Mais lui aussi se dissimula derrière les « signes religieux ostentatoires », faisant semblant d’inclure dans sa législation les croix trop visibles ou les calottes portées par certains enfants juifs. Personne ne fut dupe (…) Les élites administratives françaises - et en particulier la crème de la crème du Conseil d’Etat - avaient adhéré à l’idéologie mondialiste et multiculturaliste, exaltant la diversité et l’égalité des cultures, fondée sur une lecture simplifiée et même dévoyée des travaux de Claude Levi-Strauss. Avant sa décision de 1989 autorisant le port du voile à l’école, le Conseil d’Etat avait approuvé en 1980 le regroupement familial d’Africains polygames (arrêt Montcho) ; et c’est un tribunal administratif qui avait interdit au maire de Paris (Jacques Chirac) de verser une allocation réservée aux familles françaises (…)

Le voile ne concerne les femmes qu’en ce qu’il marque leur reprise en main, non par les hommes, mais par la communauté des croyants (…) Ce voile (…) signifie que la communauté contrôle et surveille ses ouailles (…)

Selon la lettre du Coran, ces musulmans-là n’avaient pourtant pas le droit de résider en terre impie. Le monde est en effet partagé par la Tradition en Maison d’Islam (Dar al-Islam) et en Maison de la guerre (Dar al-Harb). Entre les deux, il n’y a rien. Quand il construit une mosquée quelque part, le musulman sacralise le lieu, le transforme aussitôt en un territoire rattaché au Dar el-Islam, le sanctifie, le lave de ses péchés et de ses impuretés, chasse les mécréants et corrige les mauvais musulmans (…)

Pendant les années 1960 et 1970 (…) la plupart des immigrés étaient des Kabyles, ancien chrétiens convertis de force mille ans plus tôt, bien heureux de cet éloignement géographique qui leur permettait d’alléger les contraintes religieuses. c’était le temps de « l’islam des darons » (des pères), comme dit Kepel en reprenant le langage des jeunes banlieusards. L’arrivée des femmes et des enfants dans le cadre du regroupement familial détruisit cette authentique « intégration ». Devant leurs femmes et leurs enfants, les pères se devaient de reprendre la transmission des rites séculaires (…) le refus irréductible de l’islam de se fondre dans le creuset français. Sa préconisation ultime le rapproche des ennemis farouche de l’Etat-nation - des libéraux mondialistes à l’extrême-gauche internationaliste - qui tendent ansi la main aux islamistes - salafistes et Frères musulmans - eux aussi internationalistes, mais dans le cadre de l’Oumma, pour contraindre la France à s’auto-détruire.


La Révolution de 1789 avait accouché de la « Grande Nation » française, comme l’avaient surnommée les Allemands (…) 

L’Amérique de George Bush soutenait sans faille Helmut Kohl, confirmant ainsi la constante germanophilie des dirigeants américains tout au long du XXè siècle en dehors des périodes de guerre (…) 

Bientôt, toutes les anciennes démocraties populaires sous tutelle soviétique formeraient l’arrière-cour économique de l’Allemagne qui y installerait ses usines avec des ouvriers expérimentés aux salaires modiques. Mitterand crut conjurer la déroute française en arrachant le Deutsche Mark aux Allemands, et en noyant la puissante Bundesbank dans l’aréopage d’une Banque centrale européenne (sise à Francfort quand même !). 

(…) s’il y aune culture européenne, il n’y a pas de peuple européen (…) 

Pendant des siècles, le Saint Empire romain germanique avait joué au chat et à la souris avec le roitelet capétien qui refusait de se soumettre et avait la prétention de se « vouloir empereur en son royaume » (…) C’est finalement Napoléon qui réussit là où avaient échoué François Ier et Louis XIV. Après Austerlitz, il détruisit le Saint Empire.


En 2002, à peine réélu, le président Chirac annoncera les trois priorités de son quinquennat qui s’ouvrait : lutte contre le cancer, lutte contre l’insécurité routière et insertion des handicapés ; des objectifs dignes d’un président de conseil général (…) L’émergence de ce nouveau pouvoir fondé sur l’évaluation et la surveillance permanente avait été annoncée par Michel Foucault avec son concept de « biopouvoir » On avait renoncé à gouverner les individus, mais on contrôlait la collectivité la collectivité par l’hygiène, l’alimentation, la sexualité. Le pouvoir avait troqué la police traditionnelle contre des moyens bureaucratiques et médicaux ; l’alliance redoutable de l’expert et du communiquant.


(…) comme si les rappeurs voulaient à toute force donner raison à ceux qui les traitaient de « barbares », qui vient du mot barbaroï, signifiant en grec ancien, nous dit Lucien Jerphagnon, les « bafouilleurs ».


Pour réussir ce coup d’Etat postdémocratique, nos élites utiliseront al méthode redoutablement efficace de « l’engrenage » : chaque étape de la construction européenne entraîne la suivante comme une nécessité dont la remise en cause coûterait trop cher. La transformation du Marché commun en Marché unique appellerait la création de la monnaie unique, qui exigerait à son tour des règles budgétaires communes. Une tutelle technocratique de fer serait peu à peu apposée sur les Etats à grands coups de directives et de normes. La Banque centrale fut elle aussi rendu indépendante pour échapper au contrôle démocratique (…) La construction européenne élèvera un mur entre une représentation sans pouvoir (les gouvernements des Etats) et un pouvoir sans représentation (les technocrates, les juges et les lobbies à Bruxelles) (…) « Il y va, je le répète, d’un enjeu de civilisation. L’alternative au monde violent et injuste, où la chute du mur de Berlin reçoit en écho les émeutes de Los Angeles, c’est l’avènement de la nation européenne porteuse de paix, de civilisation et de solidarité. » (Jean-Luc Mélanchon, septembre 1992).


Un député communiste de Seine-Saint-Denis, reprit, en 1992, l’idée de sa collègue de parti (…) La législation sur le prénom était jusqu’alors fixée par la loi du 11 germinal de l’an XI, sous le Consulat. L’article 1 précisait que (…) « les noms en usage dans les différents calendriers, et ceux des personnages connus de l’histoire ancienne, pourront seuls être reçus comme prénoms sur les registres de l’état civil destiné à enregistrer la naissance des enfants… »


Berlusconi devait tout aux juges italiens et à leur opération « Mani pulite » du début des années 1990. En éliminant les principaux dirigeants de la Démocratie chrétienne et du parti socialiste, convaincus de corruption, les juges avaient permis à Forza Italia de Berlusconi, construction politique de bric et de broc, de rassembler tous ceux qui s’opposaient à l’avènement du parti communiste, resté seul debout dans les décombres de la partitocratie italienne.


Quelques jours après la victoire de l’OM en coupe d’Europe, le maire de Valenciennes, Jean-Louis Borloo, vieux complice de Bernard Tapie au temps où ils écumaient de concert les tribunaux de commerce pour s’enrichir, trouvait avec Tapie un compromis honorable pour sortir de cette affaire dérisoire.


(…) ce discours du Vel’ d’Hiv’ serait toujours mis au crédit de Chirac, même par ses détracteurs les plus farouches ; il resterait comme son chef d’œuvre, son legs à la postérité reconnaissante, son abolition de la peine de mort (…) Mitterrand était révulsé par ce renoncement symbolique : « Ceux qui réclament que la France s’excuse n’aime par leur pays. » (…) Mitterrand accusait Serge Klarsfeld d’avoir remué ciel et terre, Juifs français et américains, pressions nationales et internationales, pour le faire plier. Mitterrand n’avait jamais cédé ; Chirac n’aura jamais résisté. Klarsfeld triomphait. C’était le combat de sa vie (…) Depuis des années, la lente érection de la Shoah comme crime des crimes, et des Juifs comme victime absolue, avait déjà beaucoup agacé les survivants et héritiers d’autres massacres de l’Histoire. Dès 1976, Charles Aznavour, d’origine arménienne, avait déclaré, en commentant sa chanson « Ils sont tombés » : « Qui ne fait pas sien tous les génocides n’en fait sien aucun. » (…) Le président Chirac dut cependant tenir compte de cette frustration des militants de la cause noire. Ils obtinrent, eux aussi, leur journée commémorative de la traite des Noirs et de l’esclavage, et leur loi mémorielle. L’engrenage s’avéra diabolique. On vota aussi une loi sur le génocide arménien ; et la conquête coloniale fut stigmatisée. Chaque « communauté » exigeait sa loi mémorielle et sa journée commémorative, son crime contre l’humanité, son génocide. Chaque « communauté » réclamait à l’Etat français qu’il payât la dette contractée à son égard (…) On abandonnait le temps glorieux des « morts pour la France » pour entrer dans le temps hargneux des « morts à cause de la France ». Chacun rêvait de devenir victime…


Le plan Juppé de réforme de la Sécurité sociale avait été présenté par le premier ministre le 15 novembre à l’Assemblée nationale, sous les acclamations, debout, des députés de la majorité, mais aussi d’une grande partie des élus de gauche (…) ce plan qui osait à la fois poser des plafonds quantifiés aux dépenses médicales, mais aussi - et surtout - réformer les retraites (passer de 37,5 à 40 annuités de cotisations) et supprimer les régimes spéciaux qui permettaient aux cheminots de partir en retraite dès l’âge de 50 ans (…) L’enthousiasme de l’ancien ministre de Michel Rocard avait le mérite de la cohérence : Juppé mettait en application les mesures préconisées par le « Livre blanc sur les retraites », rédigé sous les gouvernement Rocard, dont celui-ci avait lui-même prophétisé qu’il contenait «  de quoi faire sauter plusieurs gouvernements » (…) Au bout de trois semaines de blocage, la patronat français contraignit Alain Juppé à capituler.


1995 (…) L’arrêt Bosman fut célébré par les médias français comme une grande victoire de la « Liberté » ; les associations d’extrême gauche et antiracistes se réjouirent d’un recul de la xénophobie et du racisme. Le résultat fut conforme à leurs espérances. En quelques années, le football européen devint la vitrine glaçante de la mondialisation libérale. Les transferts se multiplièrent ; les tarifs de joueurs explosèrent, atteignant des sommets vertigineux. Les clubs anglais, enhardis par les encouragements de Margaret Thatcher, poussèrent les premiers la logique libérale de l’arrêt Bosman jusqu’au bout ; les joueurs britanniques devinrent minoritaires dans les équipes du championnat anglais.


(…) notre force aérienne de combat a été ramenée à trois cent appareils et notre marine à moins de trente grandes unités navales, dont un seul porte-avions ; nous avons perdu notre statut de marine mondiale. Le budget de la défense fut, sous toutes les majorités, de Lionel Jospin à François Hollande, en passant par Nicolas Sarkozy, le seul qui subit une diminution constante et persévérante jusqu’à descendre sous la barre critique des 2% du PNB. En cinquante ans, du général de Gaulle à François Hollande, l’effort de défense sera passé du 5,44% du PIB à 1,56% en 2012. En 2020, il atteindra le chiffre famélique de 1,26% (…) 103 000 hommes. Le chiffre de 100 000 soldats n’est pas innocent dans notre histoire récente : c’est à cet étiage humiliant que le traité de Versailles réduisit l’armée allemande en 1919 ; c’est, en réponse du berger à la bergère, ce qui fut accordé à l’armée française vaincue en 1940 dans le cadre de l’armistice signée par Vichy ! A cette époque, une armée de 100 000 hommes était tout juste bonne à rétablir l’ordre intérieur (…)

Sous la Restauration, la France vaincue par l’Europe coalisée contre Napoléon, renonçait à ses rêves de domination continentale, et se soumettait à ses vainqueurs regroupés sous la houlette de la puissance hégémonique de la première mondialisation qui s’annonçait : la Grande-Bretagne (…) Nous revivons la même histoire : nous nous rangeons, après la parenthèse gaullienne, sous le drapeau de la puissance hégémonique de la seconde mondialisation : l’Amérique ; nous ferraillons partout, en Afghanistan ou au Kosovo, non pour défendre nos intérêts nationaux mais au nom des droits de l’homme et de la démocratie qui ont remplacé la monarchie et la chrétienté. Une fois encore, nous rêvons d’être le fils préféré de la « famille occidentale », selon la formule de Sarkozy, comme Talleyrand rêvait de voir la France avoir enfin « droit de bourgeoisie » au sein de la famille monarchique.

La France semble depuis Waterloo condamnée à l’anachronisme. Nous réintégrions alors la grande famille des Rois, alors que le siècle annonçait leur mort partout en Europe. La France réinvestit l’OTAN alors que l’Alliance occidentale a perdu son fondement avec la dissolution du Pacte de Varsovie.


(…) Richard  Descoings acheva son quatrième mandat de directeur de Sciences Po, près de vingt ans plus tard, marié à Nadia Marik, pour qui il manifestait une passion fusionnelle, tout en restant fidèle à son compagnon de toujours, Guillaume Pepy, patron de la SNCF, formant un trio bourgeois qui aurait enchanté Oscar Wilde (…) Lorsque Richard Descoings arriva à la tête de Sciences Po en 1996 (…) il doubla le nombre d’élèves (de 4000 à 9000) et porta les droits d’inscription jusqu’à 12 000 euros par an pour les familles les plus aisées qui, à Sciences Po, sont aussi ls plus nombreuses (…) Descoings en usa et en abusa, en se faisant voter un salaire mirobolant de 500 000 euros par an (…) Le modèle de Descoings fut cette Amérique des west and east coasts, libérale et libertaire, individualiste, inégalitaire, multiculturaliste et féministe (et gayfriendly), adepte d’un protestantisme cool et festif, où le culte de l’argent a détruit l’antique morale des pères fondateurs et les anciennes solidarités communautaires (…) Descoings transforma les enseignements ; un jour, il organisait une rencontre « minorités visibles » avec l’association breakdance du 93 ; un autre jour, avec des étudiants handicapés ; on introduisit des cours sur les discriminations subies par les femmes, à la manière des gender studies des universités américaines. Il fit de l’anglais la matière phare, une quasi obsession (…) La bible des étudiants n’était plus le journal vespéral Le Monde, mais le Financial Times, à lire chaque matin (…) le grand romancier Tom Wolfe publierait un roman truculent, Moi, Charlotte Simmons, qui décrivait les ravages causés par cette mesure [la discrimination positive] sur le niveau intellectuel des universités américaines.


Le « sans-papiérisme » est un bel exemple de créativité sémantique qui prouve que les ateliers d’écriture d’extrême gauche n’ont jamais fermé leurs portes depuis Mai 68. « Ils ont inventé l’euphémisme de « sans-papiers » pour parler des irréguliers. « Irréguliers » renvoie à la fraude ; « sans-papiers » à la perte de quelque chose d’important comme « sans famille » : c’est un bel exemple de manipulation linguistique », explique dans Le Figaro du 1er juillet 1997 l’ancien prêtre Jean-Claude Barreau, qui avait été conseiller du ministre de l’Intérieur Charles Pasqua entre 1993 et 1995. Ce n’était plus le clandestin qui était en faute parce qu’il n’avait pas de papiers, mais l’Etat qui était en faute de ne pas les lui avoir donnés (…)

Les deux piliers de l’économie souterraine sont, selon ces organismes internationaux, le travail clandestin et le trafic de drogues (…) Le « sans-papiers » est une de ces magnifiques « idées chrétiennes devenues folles » annoncées par G.K. Chesterton (…)

« Tant qu’une nation conserve la conscience de sa supériorité, elle est féroce et respectée. Dès qu’elle la perd, elle s’humanise et ne compte plus », disait Cioran.


« Le Livre noir du communisme » dirigé par Stéphane Courtois parut en 1997 (…) on fit haro sur le Courtois. L’historien, dans sa préface, avait commis un double sacrilège (…) le chiffre de 100 millions de victimes du communisme, qu’il opposait lui-même, avec un brin de perversité, aux 25 millions de morts provoqués par le nazisme (…) Rien de nouveau sous le soleil : les avocats du communisme retrouvait le vieil argument forgé jadis par Staline, qui avait recommandé dès les annes 1930 aux membres de l’Internationale communiste d’accuser leurs adversaires de faire le jeu du fascisme ! (…) Jean-François Revel rétorqua que le communisme était en réalité plus pervers que son alter ego nazi puisqu’il se « dissimule derrière un discours progressiste et humaniste ; au moins le nazisme annonce la couleur. » (…)

Orwell avait déjà déploré en son temps que la gauche était toujours « antifasciste » mais rarement « antitotalitaire. »


Kopa et Platini (ou Tigana, Amoros, Piantoni, Genghini, Janvion, Trésor) étaient regardés comme des Français, pas des descendants de Polonais, Italiens, Espagnols, Antillais, Africains. On insistait d’abord sur la chance qu’ils avaient eu de le devenir, et non sur la « chance » qu’ils étaient pour la France (…) Le soir de la victoire [1998], dans les vestiaires de l’équipe de France, alors que le président Chirac venait les congratuler, et que le champagne coulait à flots, Lilian Thuram réclama une « photo entre Noirs » sous les yeux écarquillés de certains de ses partenaires blancs (…) Les jeunes de « cités » deviennent majoritaires dans les centres de formation de France et de Navarre ; y importent leur mœurs violentes : « Le centre de formation, c’est la jungle. Je l’ai vécu comme ça, avoue un jeune joueur qui, par crainte de représailles sans doute, souhaite conserver l’anonymat. C’est la loi du plus fort. Les mecs qui viennent des quartiers imposent cette mentalité. » (…) Les jeunes farouches ne respectent plus ni entraîneur ni formateur. Ils n’acceptent de se soumettre à l’autorité qu’à l’étranger, dans les clubs anglais, italiens ou allemands, comme si ce n’est pas l’autorité en soi qui pose problème, mais la France (…)

Lors de la Coupe du monde de 2010 (…) on apprendra que les repas servis à table aux joueurs de l’équipe de France étaient halal ; que les joueurs étaient sous la coupe de ceux qu’on appelait des « caïds » : Ribéry, Evra, Anelka, tous trois convertis à l’islam ; que ce dernier traitait son « coach » d’« enculé » ; que le joueur Gourcuff, trop bien élevé, trop « français », était victime d’un violent ostracisme. Cette équipe de 2010 se révélait l’exacte antithèse de celle de 1998 et son duo « tradi » Jacquet-Deschamps, avec Raymond Domenech, son sélectionneur bobo progressiste, militant de gauche, qui « se rêvait acteur »…


Les pilotes allemands avaient montré par leurs exploits qu’ils valaient bien les meilleurs Français et Britanniques, et la puissante industrie germanique de l’aviation n’avait ployé que devant le géant américain. Les Alliés de la Seconde Guerre mondiale retinrent la leçon et interdirent à l’Allemagne de construire des avions. Ce diktat dura jusqu’en 1955. Comme les Docteur Folamour avaient pris les chemins de Washington ou de Moscou, les meilleurs ingénieurs aéronautiques allemands désœuvrés traversèrent le Rhin pour s’installer en France.


Pour la première fois dans l’Histoire, les classes populaires ne résident pas là où se créent les richesses (…) l’économiste Paul Krugman qui avait résumé la mondialisation comme « l’alliance entre Walmart et le Parti communiste chinois » (…) L’entrée de la Chine dans l’OMC en 2001 fut la cause majeure de la stagnation des salaires pendant toute la décennie qui suivit, dans les pays riches, aux Etats-Unis comme en Europe (…) 

Quelques semaines après l’entrée de la Chine dans l’OMC, au 1er janvier 2002, les citoyens européens trouvaient l’euro dans leurs poches. On avait pris soin de ne pas graver sur les billets de personnages de l’Histoire ou de monuments réels. On flottait dans l’air avec une monnaie sans racines. Sans Etat pour la garantir. Une monnaie hors-sol. On était au comble de la « modernité » virtuelle. On croyait ainsi éluder le poids du passé, des nations et des rapports de force. La réalité se vengerait, mais attendit son heure (…)

Quinze ans après la mise en place de l’Euro, la production industrielle italienne avait chuté de 21%, l’espagnole de 15%, la française de 12%, l’anglaise (sans l’euro) de 5%. Durant la même période la production allemande avait progressé de… 34% ! (…) Nos déficits avec la Chine et l’Allemagne constituaient le cœur de notre déficit commercial abyssal. En 2013, le déficit avec la Chine de 21,6 milliards d’euros représentait 40% du déficit commercial total de la France.


Lorsque Chevènement occupait la place Beauvau, il avait exigé d’eux des modifications de leur dogme, afin qu’il s’adaptât aux mentalités françaises, sur l’égalité entre hommes et femmes ou la laïcité (…) Il avait en particulier focalisé son offensive sur l’apostasie. Tout musulman qui se convertit à une autre religion est, selon le Coran, condamné à mort. Chevènement voulut obtenir l’abolition de cette menace. Les discussions furent rugueuses (…) Les musulmans signèrent une déclaration de principe qui faisait référence entre autres à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, du 4 novembre 1950 (…) cette convention mentionne expressément le droit de tout homme à changer de religions (…) Ils n’eurent aucun mal à obtenir du successeur du rigoriste Chevènement qu’il mît à la poubelle les conclusions de l’accord de son prédécesseur.

(…) muslim signifie à la fois soumis à Dieu et musulman. Abraham, Moïse et Jésus étaient soumis à Dieu, ils étaient donc musulmans (…) Dans son livre, Islam, phobie, culpabilité, le psychanalyste Daniel Sibony développe avec brio cette analyse, expliquant ainsi les innombrables anathèmes qu’on trouve partout dans le Coran contre les juifs et les chrétiens, traités de « pervers, injustes, dissimulateurs, menteurs », « maudits par Dieu à cause de leur incrédulité », « transformés en porcs et singes par Dieu qui les a maudits ». Bref, des juifs et des chrétiens à « combattre » sans répit. (L’arabophone Sibony rappelle alors que si la traduction française du Coran a choisi le mot « combattre », elle aurait aussi prendre le terme « tuer », puisque le mot arabe pour « combattez-les », qatilou, a la même racine que « tuer ».) (…)

Dans son fameux texte, sans cesse repris mais compris partiellement Qu’est-ce qu’une nation ?, Ernest Renan (…) prône une adhésion personnelle et volontaire, le fameux « plébiscite de tous les jours ». Mais ce plébiscite, et on l’oublie toujours, repose sur « la possession en commun d’un riche legs de souvenirs ; la volonté de continuer à faire valoir l’héritage qu’on a reçu indivis. »


L’Union européenne s’organisait autour du droit et du Marché. Son inspiration philosophique était un libéralisme de haute volée, tirée de l’œuvre de Montesquieu ou de Locke qui, luttant à l’époque contre les abus des monarchies absolues, s’efforçaient d’ériger des contre-pouvoirs, afin de protéger la liberté des individus. Mais ce noble héritage des penseurs libéraux fut complété et dévoyé par une nouvelle religion qui émergea sur le continent européen (et lui seul) après la Seconde Guerre mondiale, un universalisme inspiré de son modèle chrétien, mais sans le dogme, car coupé de ses racines religieuses, un millénarisme postchrétien concomitant de la baisse de la pratique religieuse, porté au départ par les élites démocrates-chrétiennes qui ont fait l’Europe, et devenu la religion des droits de l’homme de toutes les élites européennes. « Ce postchristianisme est aujourd’hui un millénarisme dévot de l’universel, très hostile à la souveraineté des nations européennes. C’est lui qui inspire la construction européenne. C’est lui qui vide les institutions démocratiques de leur contenu politique. C’est lui qui prône sur le mode universel l’amour de l’autre poussé jusqu’au mépris de soi. » (Jean-Louis Harouel, Revenir à la nation, 2013) (…)

La BCE récupéra des pouvoirs régaliens majeurs, qui revenait aux rois depuis la nuit des temps : émission de la monnaie, supervision des banques, pouvoir de les sanctionner, et de les sauver ; et même depuis la crise de 2010, financement des Etats, pourtant interdit par ses statuts (…) Cette oligarchie n’est élue par personne et n’a de comptes à rendre à aucun peuple. Ses membres son désignés par des chefs de gouvernement (…) Les salaires de la chancelière allemande et du président de la République française sont inférieurs de 21% et 30% à celui d’un commissaire européen (…)

En 2013, Jean Claude Trichet n’était plus gouverneur de la Banque centrale. Il avait laissé son trône à un Italien retors, une sorte de cardinal Mazarin de la finance : Mario Draghi. Un brillant diplômé du MIT et d’Harvard ; mais aussi un ancien de Goldman Sachs, cette puissante et sulfureuse banque d’affaires américaine, qui avait permis au gouvernement grec de dissimuler à l’Union européenne l’énorme déficit de ses finances publiques, dont la révélation bien des années après l’entrée de la Grèce dans la monnaie unique fut à l’origine de la crise qui faillit emporter l’euro en 2010.


(…) ce n’est qu’après la Seconde Guerre mondiale que les CRS ont remplacé une armée qui n’avait jamais hésité à « tirer dans le tas » (…) 

Lors des manifestations contre la loi Fillon en mars 2005, une jeunesse des écoles, issue de la petite-bourgeoisie, où les filles tenaient le premier rôle mis en scène par des médias enthousiastes, fut agressée et dépouillée par des hordes de garçons venus des banlieues - ceux-là même qui défendront la mémoire de leurs camarades électrocutés de Clichy-sous-Bois - dans un mélange de mépris sarcastique et de haine pour ces bolos incapables de se défendre (…) Ces deux jeunesses-là sont connues, reconnues, médiatisées. Elles sont le produit des métropoles mondialisées. Elles sont - toutes deux - des privilégiées, car vivant dans des lieux majeurs de production et d’échanges (…) La jeunesse diplômée des centres-ville fait profession d’anti-racisme et de tolérance à l’égard des minorités ; victime désignée et d’avance compréhensive, atteinte d’une sorte de syndrome de Stockholm, comme si elle tenait le rôle du gibier féminin face au chasseur viril. La jeunesse dorée est fascinée par celle des banlieues, à qui elle emprunte, dans un mimétisme classique, codes vestimentaires et langagiers ; et achète sa drogue.

(…) à Villiers-le-Bel (…) pour la première fois, les émeutiers sortirent fusils de chasse et fusils à pompe (…) Un policier perdit un œil ; un autre, un testicule. La police ne répliqua point. Les ordres des officiers étaient formels.


En février 2008, l’Assemblée nationale autorisait le président de la République à ratifier le traité de Lisbonne, par 336 voix contre 52 et 22 abstentions (…) Le texte constitutionnel repoussé par le peuple français avait été démantibulé comme une vieille poupée ; mais peu de morceaux avaient été mis à la poubelle, seuls les plus voyants (…) Pendant la campagne électorale pour le référendum français sur le traité constitutionnel de 2005, un des principaux hiérarques européens, alors président de l’Eurogroupe, le Luxembourgeois Jean-Claude Juncker, apprécié des journalistes pour son ironie acerbe, avait prévenu avec une franchise rigolarde mâtinée de cynisme : « Si c’est oui, nous dirons : donc on poursuit ; si c’est non, nous dirons  on continue. » Le glas sonnait pour la souveraineté populaire ; quinze ans seulement après qu’on eut célébré, avec le traité de Maastricht la mort de la souveraineté nationale.

Nicolas Sarkozy fut une Bonaparte de carnaval ; François Hollande est un Mitterrand de carnaval et Manuel Valls, un Clemenceau de carnaval. La Vè République est devenue la République radicale en pire.


Plus de la moitié des entreprises du CAC 40 appartient à des fonds étrangers. La France industrielle n’appartient plus à la France. Le CAC 40 n’a plus accueilli de nouvelles entreprises depuis vingt ans.


Le fameux slogan européiste, « Plus fort ensemble », a désormais le fumet cruel d’une anti-phrase : l’Europe est devenu un vaste champ de bataille économique, de concurrence, de compétition, de rivalité (…) En brisant les tables de la souveraineté, nos gouvernants ont aboli leur pacte millénaire avec les Français.


Nos dirigeants sont devenus des prêtres. Ils ne gouvernent plus, ils prêchent. « Il y a une répétition des rôles. La gauche nous surveille de près, comme il convient pour un peuple qu’elle estime dangereusement porté au racisme et à la xénophobie. La droite nous menace sans cesse des réformes décisives qui nous mettront enfin au travail, puisqu’apparemment nous sommes de grands paresseux. Finalement, droite ou gauche, ils sont moins nos représentants et gouvernants que les gardiens de notre vertu » (Pierre Manent, Le Figaro, janvier 2014). Ils brandissent al contrainte extérieure comme une épée dans nos reins ; et l’Europe comme un graal qui se gagne par d’innombrables sacrifices. Ils se lamentent : la France est irréformable ; elle préfère la Révolution aux réformes et, sinon, elle coupe la tête au roi ! (…) Nos élites, qui viennent pour la plupart de la haute fonction publique, et ont bénéficié des avantages du système mandarinal à la française, veulent imposer le système anglo-saxon du struggle for life à toute la population, sauf à eux-mêmes (…)

On nous dit qu’on instaurera la flexi-sécurité à la danoise, la finance à l’anglaise, le référendum à la suisse, la pénalisation des clients des prostituées à la suédoise, la réduction des déficits à la canadienne, la baisse des impôts à l’italienne, le sauvetage de notre industrie automobile à l’américaine, et même, sans le dire, la baisse des salaires à l’espagnole. Mais nos modèles eux-mêmes changent de modèle. On prétend supprimer le SMIC quand les Allemands l’instaurent, on développe la discrimination positive au moment où les Américains l’abolissent (…)

La droite a abandonné l’Etat au nom du libéralisme ; la gauche a abandonné la nation au nom de l’universalisme. La droite a trahi le peuple au nom du CAC 40 ; la gauche a trahi le peuple au nom des minorités. La droite a trahi le peuple au nom de la liberté ; cette liberté mal comprise qui opprime le faible et renforce le fort (…) La gauche a trahi le peuple au nom de l’égalité. L’égalité entre les parents et les enfants qui tue l’éducation ; entre les professeurs et les élèves qui tue l’école ; l’égalité entre Français et étrangers qui tue la nation (…)

Le peuple (…) dédaigne la plupart des films français, alourdis par un politiquement correct de plomb, mais fait un triomphe aux rares audacieux qui exaltent les valeurs aristocratiques d’hier (Les Visiteurs), le Paris d’hier (Amélie Poulain), l’école d’hier (Les Choristes), la classe ouvrière d’hier (Les Ch’tis), la solidarité d’hier (Intouchables), et l’intégration d’hier (Qu’est-ce que j’ai au bon Dieu ?). A chaque fois la presse de gauche crie au scandale, à la ringardise, à la xénophobie, au racisme, à la France rance ; mais prêche dans le désert. A chaque fois, les salles sont remplies par des spectateurs enthousiastes qui viennent voir sur pellicule une France qui n’existe plus, la France d’avant.

Marcel Gauchet a bien résumé notre malheur : « Notre héritage fait de nous des inadaptés par rapport à un monde qui dévalorise ce que nous sommes portés spontanément à valoriser, et qui porte au premier plan ce que nous regardions de haut. »

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire