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vendredi 14 août 2020

"Puissance du mythe" de Joseph Campbell (1988)

Le mythe est le rêve public alors que le rêve est le mythe individuel. Si votre mythe individuel, votre rêve, coïncide par chance avec celui de la société, alors vous êtes en harmonie avec votre groupe. Sinon, l’aventure vous attend dans la forêt sombre.

(…) avant les contractions de l’utérus, le fœtus n’a aucune conscience individuelle. L’épouvante est la première sensation qu’il ressent avant d’être expulsé. C’est la peur qui fait dire : « Je ». Puis vient le travail de la naissance proprement dite, ce chemin pénible et terrifiant vers la lumière.

Je crois que nous recherchons tous une façon d’expérimenter le monde qui nous permette d’accéder à la transcendance qui le vivifie et dont nous ressentons l’appel intérieurement.

Lorsque vous comprenez que Dieu et sa Création ne font qu’un et que vous êtes l’une de ses créatures, vous comprenez aussi que Dieu est en vous et qu’il est aussi dans cet homme ou dans cette femme à qui vous parlez.

Il faut s’identifier au positif plutôt qu’au négatif. Vous voyez, la religion est une sorte de deuxième matrice. Elle est faite pour amener l’être humain - cette organisation extrêmement complexe - à la maturité, c’est-à-dire à l’autonomie et au choix de ses propres motivations. L’idée du péché, en revanche, vous maintient toute votre vie dans une condition servile (…) Le péché, en fait, n’est qu’un facteur limitant la portée de votre conscience et la réduisant à une condition inférieure (…) Il est recommandé de se mettre dans des situations qui stimulent ce qu’il y a de meilleur en vous, et non ce qu’il y a de pire : « Ne nous laissez par succomber à la tentation »
Comme le disait Novalis : « Le siège de l’âme est situé au confluent du monde intérieur et du monde extérieur «

Il faut accepter le miracle de la vie tel qu’il se présente, et non exiger qu’il suive des règles. Sinon vous ne parviendrez jamais à la dimension métaphysique.

(…) notre incapacité à juger. Qui sommes-nous pour cela ? Il me semble que c’est aussi une des grandes leçons données par Jésus.

La beauté du chant d’un oiseau est-elle intentionnelle ? Dans quelle mesure ? Ou bien est-ce la manifestation de l’oiseau ? L’expression de son âme ? La beauté (…) est-elle consciente et intentionnelle ? C’est une importante question.

Un film est peut-être l’équivalent d’une représentation mythique (…) mais, malheureusement pour nous, la plupart des gens qui écrivent ces histoires n’ont aucun sens des responsabilités (…) il n’y a  personne pour endosser la responsabilité dont se charge le prêtre dans l’accomplissement d’un rituel.

Maintenant, le prêtre fait face à l’assistance et tout est accueillant et familier (…) Ils ont oublié que le but d’un rite est de vous sortir de vous-même et non de vous emmitoufler dans le quotidien.

Nous devons garder les mythes vivants. Les artistes le peuvent quelle que soit leur spécialité. L’artiste a pour fonction de mythifier l’environnement et l’univers.

Vous passez votre temps à faire ce qui vous est demandé. Où trouvez-vous un instant de bonheur  ? il faut savoir répondre à cette question. Écoutez le disque que vous aimez vraiment même s’il s’agit d’une musique banale que tout le monde méprise. Ou lisez votre livre favori. Dans votre endroit sacré, vous ressentirez cette révérence envers la vie et cette exaltation que ces gens ressentaient envers le monde entier (…) Lisez ce qui vous intéresse et vous trouverez peu à peu au monde qui vous entoure une signification qui vous éclairera. Si vous passez d’un écrivain à l’autre, vous pourrez sans doute acquérir une culture littéraire mais ils ne vous parleront pas vraiment.

(…) la métamorphose de la passion en compassion (…) C’est la notion mystique de la fonction spirituelle de la souffrance à travers le monde. Celui qui souffre nous apparaît pour éveiller en nous le seul sentiment qui transforme les bêtes de proie que nous sommes en êtres humains dignes de ce nom. La compassion est la seule chose qui importe.

La mythologie est une poésie et la langage poétique est très souple. La religion transforme la poésie en prose. Dieu est vraiment là-haut, il pense vraiment ceci et voici la façon dont vous devez vous comportez pour entrer en contact avec lui.

C’est la vieille idée de la métamorphose du poisson en homme. Le poisson représente le côté le plus primitivement animal de notre nature et c’est par la religion - comme par une ligne de pêche - que nous parvenons à le dépasser.

Je crois que tout individu élevé dans un milieu social extrêmement strict et autoritaire a peu de chance de parvenir à la connaissance de soi (…) Il est écolier ? Il obéit à ses maîtres et il compte les jours qui le séparent des vacances pour pouvoir être lui-même.

De ce point de vue, ne pensez-vous pas que tout est dû au hasard ? Il faut pouvoir l’accepter. Le hasard est l’armature de la vie —il a fait vos parents se rencontrer par exemple. Le hasard ou ce qu’on appelle ainsi, donne à la vie les moyens de se manifester (…) Prendre tout ce qui se présente comme si on l’avait choisi : voilà le meilleur conseil que l’on puisse donner. Naturellement, cela implique une participation de la volonté.

L’illumination, c’est la découverte du rayonnement de l’éternité à travers tous les éléments bons ou mauvais, du monde temporel (…) Le véritable artiste est celui qui a appris à identifier et à transcrire ce que Joyce appelait « le rayonnement » de toutes choses, c’est-à-dire la manifestation miraculeuse de la vérité. (…) Nous avons tous nos possibilités d’émerveillement devant la vie.

Il y a dans le féminité un amour illimité. Peu importe la nature spécifique de chacun. Le père est plus sélectif (…) La mère est responsable du naturel et le père du comportement social tel qu’il doit se manifester. Un retour à la nature impliquera certainement le retour au principe maternel.

« Car tous les vrais amants le savent :
L’amour qui naît des yeux et du cœur
N’est que bienveillance et pureté.
Les yeux le font naître et le cœur le mûrit,
L’amour n’est-il pas leur fruit ? »
(Guiraut de Borneilh, XIIeme s, troubadour)

Le mot « amor », épelé à l’envers donne « Roma », symbole de l’Eglise catholique romaine qui validait des mariages dont le caractère n’était que social ou politique.

Il y a l’amour familial, qui peut emplir toute une vie. Pourtant, il n’existe pas dans ce type de relation cette sensation violente qui vous fait reconnaître une âme jumelle en l’être aimé. Or, c’est cela ce que les troubadours défendaient et qui est devenu l’idéal de notre vie actuelle.

« Lorsque vous vous arrêtez devant la beauté d’un coucher de soleil ou d’une montagne en vous exclamant d’admiration vous participez à la nature divine. » (Upanishad)

Un semblable moment implique la conscience du caractère miraculeux et de la pure beauté de l’existence. Les gens qui vivent en pleine nature ressentent tous les jours ce genre de sensation. Ils vivent avec la conviction qu’il existe quelque chose d’infiniment plus grand que l’être humain.

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